La dernière guerre sainte touchait à son but. Aidée des Chevaliers Divins, la déesse Athéna était parvenue à terrasser son ennemi juré, Hadès, le Seigneur des Enfers. Cependant, cette victoire avait un goût amer; Seiya, chevalier divin de Pégase, avait donné sa vie pour servir celle qu'il avait juré de protéger avec ses frères devant le testament du Sagittaire. A présent, son cadavre gisait sur le sol du royaume des Ombres, royaume qui menaçait de disparaître d'un instant à l'autre, pouvant emporter avec lui Athéna et ses protecteurs, comme l'avait laissé entendre Hadès avant de rendre son dernier souffle. Cependant, à cet instant précis, les cinq personnes qui avaient lutté contre les Enfers ne s'en préoccupaient guère. Tous avaient les yeux rivés sur le corps sans vie de Seiya qui, ironie du sort, avait débuté sa carrière de chevalier afin de retrouver sa soeur ainée et qui devrait désormais patienter de nombreuses décennies avant d'espérer la revoir.
Après quelques secondes seulement, Athéna lâcha, d'une voix un peu éteinte:
"Rentrons...vers notre monde de lumière."
Si ces quelques mots sortis de la bouche de la déesse avaient été prononcés lentement, ils furent cependant un signal brutal de réveil pour les quatre Chevaliers Divins survivants:
"Il faut sortir le plus vite possible d'ici, Elision va sombrer dans le Néant d'une seconde à l'autre!" s'exclama Hyoga.
"Mais qu'allons-nous faire du corps de Seiya? demanda Shiryu. On ne peut pas le laisser là, et son armure divine avec!"
"Ce n'est pas un problème pour moi, répondit Ikki, j'ai été présent durant moins de temps durant cette Guerre Sainte, j'ai encore assez de forces pour le porter." poursuivit-il en ajoutant les gestes aux mots.
"Alors, sortons vite d'ici, je me souviens d'un passage vers le monde des vivants sur la droite! ordonna Athéna."
Les Chevaliers Divins obtempérèrent et, entourant leur déesse, se mirent à courir le plus vite possible vers le chemin indiqué. Si Shiryu, Hyoga et Shun marchaient d'un bon pas, Ikki était quelque peu ralenti par le poids du corps de Seiya, mais se forçait à garder à peu près le même rythme que ses frères. Si les chevaliers mettaient tout leur coeur dans cette course, il y avait pourtant de quoi les distraire; les ruines des temples d'Elision s'accumulaient, menaçant en permanence leur avancée, le sol semblait se fendre par endroits, pouvant précipiter leur chute dans les limbes. Toutefois, la concentration des quatre guerriers fut maximale trois minutes durant, jusqu'au moment où Athéna tendit son doigt vers une faille dans un mur:
"Regardez! Si nous concentrons nos cosmo-énergies en direction de cette faille, nous pourrons rejoindre la surface de la Terre!"
"Alors, agissons le plus vite possible!" dit Shun, qui commença à concentrer tout son pouvoir en fixant la faille salutaire.
Il ne fallut même pas dix secondes au Chevalier d'Andromède pour sentir le potentiel des Chevaliers du Dragon et du Cygne se réveiller. Quant à son frère le plus proche, après un bref temps de réflexion, il se décida à laisser tomber le corps de Seiya au sol pour mieux concentrer son cosmos. Et, en un peu plus de deux secondes, un flux d'énergie de couleur rouge orangé entoura le corps du chevalier Phénix. Cinq secondes plus tard, le potentiel dégagé était à son optimum, et Ikki s'apprêta à joindre son pouvoir à ceux de ses frères et d'Athéna.
Soudain, un bruit sourd se fit entendre au loin. Ikki tendit l'oreille sans pour autant diminuer sa concentration...mais sentit quelque chose trembler sous ses pieds. Nettement plus inquiet, il jeta un coup d'oeil au sol et, en une fraction de seconde, ce que lui, ses frères et Athéna virent les glaça tous d'horreur. Une faille s'était brutalement ouverte dans le sol, précisément là où Ikki avait déposé le corps de Seiya, faille laissant émerger une coulée de lave qui projeta en l'air le corps, comme s'il s'était retrouvé sur un ressort géant. Dans la foulée, le corps de Seiya chuta dans l'immense brèche qui venait de s'ouvrir, sans espoir de retour.
"Seiya!" hurla Ikki.
Mais les déboires des sauveurs du genre humain ne s'arrêtaient pas là. Car dans la seconde d'après, Ikki sentit à nouveau le sol trembler sous ses pieds et, avant d'avoir eu le temps de prononcer d'un trait le mot "anticonstitutionnellement", une nouvelle faille s'ouvrit sous ses pieds, lui faisant perdre l'équilibre. Le chevalier Phénix trébucha en avant et tomba, tête la première, dans le gouffre naissant. Shun fut tellement choqué qu'il en laissa tomber au sol sa chaîne nébulaire avant de crier, au bord des larmes:
"Mon frère! Non, pas toi!"
Shiryu et Hyoga restèrent paralysés par la stupeur. Quant à Athéna, elle murmura, les lèvres tremblantes:
"Non...D'abord Seiya, puis Ikki...ça suffit, il y a déjà eu trop de sacrifices..."
Ce fut alors qu'une voix étrange répondit à la déesse, comme un écho:
"Non, Athéna, il n'y a jamais trop de sacrifices!"
Dans la seconde qui suivit l'étrange déclaration, Athéna et les trois chevaliers survivants se retournèrent vivement. Ils semblaient désormais avoir oublié la disparition inéluctable d'Elision.
"Qui es-tu?" hurla la déesse.
"Peut-être me permettras-tu de conserver l'anonymat, suggéra la voix. Sache seulement que la Guerre Sainte n'est pas encore finie et que je compte bien me débarrasser de toi pour avoir la main mise sur la surface de la Terre!"
"Que dis-tu?" fit Athéna, qui commençait à s'inquiéter du fait que les combats n'étaient pas tout à fait terminés.
Moins impressionnés, Shiryu, Shun et Hyoga s'avancèrent pour couvrir la déesse:
"Tu sembles oublier une chose, signala Shiryu. Athéna n'est pas seule, elle a à ses côtés ses chevaliers, qui sont prêts à donner leur vie pour elle!"
"Je l'avais remarqué, fit la voix. D'ailleurs, deux d'entre vous en ont déjà fait cadeau de leurs vies, n'est-ce pas? Mais ce n'est pas vous qui allez me gêner, je puis vous le dire tout de suite!"
Alors que la voix ne s'était pas encore tue, deux ou trois éclairs firent irruption en face des Chevaliers Divins, puis ce fut le début d'une tornade qui se manifesta devant quatre visages anxieux. La voix se fit alors entendre à nouveau:
"Et ce n'est qu'une infime partie de mon pouvoir immense que vous avez sous les yeux, chevaliers d'Athéna! A présent, je vais vous envoyer loin, très loin de votre monde de lumière!"
A cet instant précis, la tornade redoubla d'intensité, la force du courant d'air augmentait dangereusement, les chevaliers pouvaient à tout moment s'envoler dans le ciel.
"Bien, continua la voix. Mon Ultime Tornade est à sa puissance maximum! Chevaliers d'Athéna, préparez-vous à connaître les terreurs de Spiralis!... Par le Cyclone des Ténèbres!"
Une demi-seconde plus tard, Athéna vit, horrifiée, les trois chevaliers suvivants être projetés en l'air par un courant d'air à force 9, puis se diriger vers une tornade dont la taille augmentait sans cesse, jusqu'à percer le plafond d'Elision. Enfin, la tornade se dirigea vers les trois infortunés protecteurs d'Athéna et les absorba sans autre forme de procès.
"Non!" hurla Athéna à nouveau.
"Ne t'en fais pas, répliqua la voix, le monde de Spiralis est suffisamment grand pour vous quatre! Par l'Ouragan Chaotique!"
Avant qu'Athéna ait pu dire un mot, son sceptre et son bouclier lui furent arrachés des mains par un courant d'air trois fois plus puissant que celui généré par le Cyclone des Ténèbres. Puis, ce fut au tour de la jeune femme d'être emportée par une puissance inconnue, mais qui semblait n'avoir rien à envier à celle d'Hadès ou de Poséïdon...
A le Ciel seul sait combien d'années-lumière d'ici, Hyoga se trouvait dans un endroit étrange. Un endroit semblable à un corridor sans fin, où le noir, le gris et l'indigo semblaient se mélanger. Ses doigts se recroquevillèrent lentement. Il poussa un soupir bref puis, tant bien que mal, se remit sur ses deux pieds. Il tourna sur lui-même pendant cinq secondes avant de constater où il se trouvait. Il écarquilla des yeux par deux fois. Cela ne ressemblait ni au Sanctuaire, ni au royaume d'Asgard, ni au Sanctuaire sous-marin, ni au monde d'Elision.
"C'est étrange, c'est...c'est comme si ce cyclone m'avait projeté hors du monde tel que je le connais..."
En guise d'écho, un rire sardonique se fit entendre dans la pièce et glaça le sang du Chevalier du Cygne (un comble pour le disciple du magicien de l'eau et de la glace).