Bienvenue sur Saint Seiya Animecdz
  




Cette fiche vous est proposée par : Aqualudo


Les ages mythologiques



Retrouvailles glacées


 



Depuis des mois maintenant, le navire menant les serviteurs d’Athéna se frayait
un passage à travers la mer hostile vers le Royaume d’Asgard. La température
avait chuté assez rapidement quinze jours après le passage des Colonnes
d’Heraklès, le septentrion n’offrant que tempêtes et pluies oppressantes aux
jeunes hommes. Ces derniers ne quittaient plus leur tente solidement installée
sur un coin du pont de cèdre, échangeant leurs impressions, leurs doutes, se
racontant leur vie, nouant des liens de plus en plus forts. Même Macubex
pouvait parfois se laisser aller à parler de lui, brisant ainsi l’écorce
entourant ses sentiments. Il s’avérait très soucieux des choses de la nature,
de la liberté, se rapprochant en ce sens beaucoup de Frank élevé pour partie
dans une terre de druides au fin fond des terres occidentales. Lorsque les
premiers flocons tombèrent Mâa, Macubex et Shiro furent les plus surpris, ne
connaissant pas ce phénomène. Les deux derniers avaient bien dans leur périple
initial traversé des montagnes enneigées, mais voir cette neige tomber au
milieu de la mer les laissait admiratifs, puis soucieux lorsque les premiers
icebergs furent en vue. Asturias tenait un journal précis, notant tout, de
manière quasi frénétique, s’intéressant particulièrement à la description des
littoraux où le navire pouvait faire halte. Le soir venu tous se retrouvaient
pour partager un repas frugal et, la terre d’Asgard se rapprochant, en profiter
pour préparer leurs recherches.

- Je suis frustré de ne pas avoir pu passer plus de temps à Hattousa. J’aurais
aimé rencontrer la prêtresse de Cybèle, multiplier les recherches. Tout va trop
vite, le temps nous impose son rythme, j’ai peur que nous passions à côté de
choses importantes, soupira Asturias en reposant le bol de soupe que Frank
venait de lui passer.

- Ta frustration est légitime, lui répondit Shiro, « mais nous n’avons pas le
choix. Nous sommes engagés dans une course, et les faits sont clairement
établis : les hommes de Poséidon sont sur les traces de Maiegeiam, nous devions
nous hâter. J’aurais beaucoup aimé moi aussi rester plus de temps à Hattousa, à
Tanis … enquêter davantage sur ces « marches », mais … »

- … le temps n’est pas notre allié, compléta Mâa en fermant ses grands yeux
bleus. « Le capitaine a dit que nous approchions de notre destination, un port
se trouvant à proximité d’une modeste cité, Troudheim. Il me tarde de quitter
ce navire et cette mer hostile. Nous allons retrouver, je l’espère, de précieux
alliés, mener au mieux notre mission, et, plus tard, retrouver la cité de
Cybèle pour notre plus grand plaisir. De la même façon, c’est avec joie que je
vous guiderai en Égypte, à la découverte de mon pays. »

Pendant que les éphèbes discutaient, le navire s’avançait silencieusement dans
la brume épaisse bordant la côte d’Asgard. Le craquement du navire était le
seul signe de vie dans ce désert de lumière, la mer semblant être étouffée dans
ses bruits par une température largement négative. Le port de Troudheim n’était
plus très loin, ils accosteraient dans la prochaine matinée. L'arrivée fut
spectaculaire ; le navire pénétra à l'intérieur d'un majestueux fjord, dont les
falaises hautes de plusieurs dizaines de mètres offraient un abri naturel à
tous les navires. Le port n'était pas imposant en lui-même ; attachés à
l'unique ponton, quelques navires se balançaient au gré des mouvements de la
mer.



***




A Troudheim, dans la grande auberge en partie recouverte d’un lourd manteau de
neige, douze personnes étaient attablées en face d’une grande table circulaire,
recouverte de mets et de bières.

- Bon, reprit Siegard en se levant, nos instructions sont claires. Gunther veut
que nous nous mettions en quête des Pommes d’Idunn et que nous en apprenions le
maximum sur la Déesse-Araignée, ses nains, son repaire, afin de la détruire le
moment venu. Nous nous entraînons durement depuis des mois. Nous avons réussi à
rallier la Forteresse sacrée, nous nous sommes endurcis, nous luttons
efficacement contre les mercenaires à la solde de Loki … le temps est venu de
passer une étape mes amis !

- Tu parles sagement Siegard. Je me sens prêt à affronter de plus grand dangers
maintenant. Le périple vers la Forteresse se passerait différemment
aujourd’hui, nous sommes forts, entraînés, nous avons su nous dépasser, je sens
que ce n’est que le début !

- Votre enthousiasme est communicatif, rétorqua Nibel en souriant. « Nous
devrions peut-être nous organiser ? Qu’en pensez-vous ? »

- Excellente idée, encore faudrait-il que nous soyions tous là ! Le Sauvage est
encore en retard, il n’est pas rentré de la forêt après notre dernière attaque
contre le campement des bandits de Vulgoth.

- Ne sois pas trop dur avec Yshba, objecta Akurgal avec conviction. « Yshba
aime la nature, il souffre de voir la folie s’emparer des animaux qu’il a
côtoyé toute sa vie. Il a toujours été là, à nos côtés, il n’aime simplement
pas la civilisation au même niveau que nous, préférant la compagnie de son loup
qu’il a sut apprivoiser. Il faut respecter ce choix. »

- D’autant plus, rajouta Rahotep, « que Lupus, son cher loup, nous aide bien au
combat. Cet animal est fidèle, Yshba est un éclaireur hors pair, je préfère
qu’il soit avec nous que contre nous. »

- Je préférerai comme Thrall qu’Yshba soit avec nous. Demain matin nous devons
rejoindre le port pour inspecter le navire venant d'Égypte Il faudra escorter
le ravitaillement jusqu’ici, il serait bon qu’il soit des nôtres.

- Il le sera Meijuk, j’ai toute confiance en lui, conclut Akurgal en se resservant
un peu de bière.

La soirée se termina comme souvent avec les chants épiques de Nibel et d'un
jeune conteur qui rivalisèrent de poésie pour narrer les exploits des
défenseurs d'Asgard. La situation générale semblait aller de mieux en mieux, les
attaques de brigands à la solde de Loki se faisaient plus rares à l'encontre
des villages éloignés, les animaux les plus dangereux ne sortaient presque plus
de leurs repaires forestiers, les serviteurs d'Odin ne doutaient plus de leur
force. Le lendemain matin, ils partirent dans la brume givrante vers le petit
port afin de mener à bien la mission qui leur avait été confiée. Il était
impossible de transporter les marchandises les plus lourdes par l'escalier,
aussi empruntait-on un chemin détourné qui était accessible aux chariots. Même
si le danger se faisait moins pressant, les denrées orientales pouvaient
toujours attirer de nombreuses convoitises. Après quelques heures de marche
soutenue, les guerriers d'Odin arrivèrent enfin sans encombre à destination. Le
petit port baignait dans la brume givrante. L'étroitesse du lieu permettait de
trouver aisément refuge face à la furie des eaux, mais dans le même temps
concentrait dans un espace réduit la brume qui ne semblait jamais devoir se
lever. Le navire était à quai depuis de longues heures maintenant, une foule de
personnes s'activant à en décharger les denrées dans une joyeuse cohue. Épices
et tonneaux de bière étaient chargés sur des charrettes dont les attelages de
bœufs à long poil attendaient patiemment sous les quelques flocons qui
tombaient sans discontinuer.



- Messire Siegard ! Nous vous attendions plus tôt, non avons un temps pensé que
les mercenaires du Fourbe avaient pu vous tendre une embuscade ...

- Tu ne dois pas t'inquiéter pour nous Kondoth, tu devrais savoir que les
troupes du Fourbe n'aiment plus croiser notre route depuis la destruction du
campement de Vulgoth, ils ont compris que l'espoir avait changé de camp,
qu'Odin peut maintenant compter sur de redoutables guerriers. Crois-moi, ces
mercenaires finiront par ne plus sortir de leur tanière. Nous sommes là par
simple précaution, mais vous ne craignez plus rien maintenant.



Le guerrier d'Odin tâchait de rassurer les habitants d'Asgard dès qu'il en
avait l'occasion, même s'il savait en son for intérieur que Loki gardait de
précieux atouts dans son jeu avec les redoutables Elfes Noirs .... Prenant le
chef du petit village portuaire par l'épaule, Siegard s'avança paisiblement
vers le navire, suivi de près par ses compagnons.



- Alors, tout s'est bien déroulé ? Le capitaine n'a rien signalé, la
marchandise est bien arrivée ?

- Oui, tout s'est bien passé, mais le capitaine a aussi ramené avec lui
quelques personnes désireuses de rencontrer les autorités. Ils vous attendent
là-bas, près du vieil arbre.



Akurgal s'avança en souriant, semblant reconnaître des silhouettes familières,
mais ce fut Inyan qui fut le plus prompt à réagir, courant à en perdre haleine
vers Frank qu'il avait tout de suite reconnu en dépit de la brume et du temps
qui les avait trop longtemps séparés. L'étreinte des deux frères fut un moment
intense, presque hors du temps. Ils étaient là, enfin réunis, plus rien ne
comptait autour d'eux, seule comptait cette joie immense qui leur arrachait ces
quelques larmes gelant presque instantanément sur leurs joues au contact du
froid polaire.



- Mâa ! Asturias ! L'Etranger ! Shiro ! Frank ! Quelle joie de vous revoir,
mais quelle surprise ! Que faites-vous ici, si loin de la terre grecque qui est
vôtre maintenant ? s'enquit Akurgal en se rapprochant rapidement de ses anciens
compagnons.

- Je pense qu'ils viennent rejoindre Odin, Athéna n'est pas à la hauteur de vos
espérances, n'est-ce pas ? lança une voix taquine.

- Pas tout à fait Thrall, rétorqua Macubex. « Je vois en tout cas que tu n'as
pas changé, toujours aussi perçant dans tes analyses. »

- Gardons notre calme voyons mes amis, coupa Mâa d'une voix grelottante.

- Ta sagesse est toujours aussi apaisante Mâa, mon frère d'Égypte, répondit
Rahotep en serrant chaleureusement la main de ses compagnons.

- C'est une grande joie de vous retrouver tous. La providence a voulu que vous
vous trouviez dès notre arrivée sur notre chemin, les dieux nous sont
favorables. Je suis surtout heureux de voir que vous êtes tous sains et saufs,
même si cette terre semble austère.

- Il faut savoir la découvrir Shiro, elle en vaut la peine, crois-moi.



Jetant un coup d'œil furtif par-dessus l'épaule de son ancien compagnon Nibel
poursuivit.

- Les autres ne sont pas avec vous, je doute qu'ils soient tous morts à la
lueur de vos visages. Vous êtes ici pour quelque chose d'important n'est-ce pas
?

- Oui, tu es perspicace Nibel. Nous vous expliquerons cela dans un endroit plus
abrité si vous le voulez bien, je ne me fais pas à ce climat si froid.
Connaîtriez-vous un lieu plus chaleureux ?

- Mâa, il est vrai que tu fais peine à voir sous ce lourd manteau de peau de
bête, on dirait que tu vas t'effondrer sous son poids ! pouffa Dimitre en
regardant Liu d'un air complice.



Un nouveau visage s’approcha des serviteurs d’Athéna. L’homme avait fière
allure dans son armure de cuir renforcé, son visage massif étant rehaussé par
une barbe finement taillée.

« Je suis Siegard, un guerrier d'Odin à l'instar de mes compagnons. Ils m'ont
beaucoup parlé de vous, je suis heureux de vous rencontrer. Nous allons vous
conduire à Troudheim où nous devons escorter ces marchandises. Là-bas vous
trouverez un abri, un bon feu et de quoi vous restaurer. Vous pourrez aussi nous
en apprendre plus sur votre long voyage. »



Le convoi s'ébranla au moment où la lune disparaissait à l'horizon, loin
derrière les hautes montagnes abritant la Forteresse sacrée d'Odin. La neige
commençait à tomber plus drue, mais pas assez pour refroidir les cœurs de deux
frères plus heureux que jamais de s'être enfin retrouvés. En ces terres
glaciales, l’hiver ne connaissait ni aube, ni crépuscule, dans ce pays
singulier où régnait immuablement la lune, baignant de sa lumière froide les
nuages chargés de flocons, des pans de ciel étoilé et cette terre immaculée.









Frères d'armes








Pendant un long repas de retrouvailles, les élus échangèrent leurs expériences.
Les serviteurs d'Athéna s'étaient mis d'accord dans le navire de ne pas trop en
dire sur la découverte du Souffle Divin et le Sanctuaire au cas où ils
retrouveraient leurs anciens compagnons, tandis que les guerriers d'Odin
étaient tenus par le secret à propos de la Forteresse sacrée, ce que Siegard ne
manquait pas de rappeler d'un œil inquisiteur à Inyan qui s'était fait le
chantre des exploits de ses compagnons, à l'instar de son frère pourtant plus
réservé pour les futurs Guerriers Sacrés d'Athéna.



- Etrange destin que le vôtre. Devoir attendre dans un village coupé du monde,
suivre un entraînement difficile pendant des mois auprès d'un maître dont vous
ne semblez pas connaître grand-chose … Devoir vous affronter en tournoi avant
que certains d'entre vous partent suivre un entraînement particulier tandis que
vous cinq menez une improbable enquête à travers l'Egypte et Asgard ! Athéna
aime assurément jouer avec les nerfs et les vies des Mortels !

- Tu sais mon frère, répliqua Frank, je trouve que devoir rester quatre saisons
seuls sur la terre de glace, être embarqués dans une guerre contre une obscure
divinité, devoir vous battre sans cesse contre des adversaires plus monstrueux
et retors les uns que les autres ... ce n'est pas non plus une preuve de grande
indulgence de la part d'Odin !

- Tu as raison, répondit Inyan songeur.



Chacun semblait tout d'un coup absorbé par ses propres pensées lorsqu'Akurgal
se décida à rompre ce moment de silence.

« Le moment semble venu de nous dire ce que vous faites en Asgard mes amis.
Qu'avez-vous appris en Égypte qui a bien pu vous mener ici. »



Les serviteurs d'Athéna se jaugèrent du regard, désignant finalement tous
Asturias comme porte-parole. Ce dernier se leva en fermant les yeux, prenant
son souffle et faisant le vide dans son esprit, avant d'expliquer au mieux ce
qui les avait poussés au cœur des terres d'Odin, sans pour autant trop en dire.



- Selon la tradition grecque, Athéna a été désignée pour sauvegarder
l'humanité, nous sommes en ce sens son bras armé, du moins nous sommes en
apprentissage pour servir cette noble cause. Notre maître nous a appris qu'un
dénommé « Maiegeiam », puissant magicien, représentait une menace pour
l'humanité. Nous avons reçu pour ordre de le trouver et de le ramener au plus
vite en Grèce, devant notre Maître afin qu'il soit jugé. Nos recherches nous
ont mené en Egypte, auprès du sage Anaximandre qui ...

- Anaximandre ! Le grand érudit ! Voilà une rencontre rare, s'enthousiasma
Akurgal à haute voix. « Ce Maiegeiam doit être très important pour
qu'Anaximandre puisse s'y intéresser ! »

- Voyons, laisse-le parler Akurgal, coupa Meijuk d'un ton agacé et attendant la
suite avec impatience.

- Ce n'est rien, mais je suis heureux de savoir que parmi nos amis la sagesse
d'Anaximandre soit connue et reconnue. Cela me sera utile dans ma
démonstration. Je disais donc qu'Anaximandre nous a aidés à en savoir un peu
plus sur Maiegeiam.



Asturias sortit son petit calepin de sa poche et lut à voix haute une partie
des réponses fournies par Anaximandre, omettant de trop en dire sur certains
points ne sachant réellement jusqu'à quel point il pouvait faire confiance aux
guerriers d'Odin.



« Mais Maiegeiam est bien plus qu'un Mortel, c'est le Mage des mages. Et il est
tout à fait possible de détruire les dieux ... il suffit de réveiller certaines
forces enfouies dans les entrailles de la Terre. Lors de la grande guerre de
l'Âge d'Or, nombreuses furent les divinités qui périrent sous les coups
d'autres dieux. Par exemple nos divinités grecques, les Olympiens, tuèrent ou
enfermèrent les forces de Chronos au plus profond du Tartare. Les Enfers
recèlent des pouvoirs incommensurables, Maiegeiam veut y accéder, telle a
toujours été sa volonté la plus profonde ... Il y a deux moyens de pénétrer
dans les Enfers, dans les Mondes souterrains, dans les abîmes de la vie ... la
première est la plus simple, il faut mourir, c'est aussi une façon définitive.
La seconde est d'y pénétrer vivant, en empruntant l'un des passages cachés. Il
y en a quelques uns, peu nombreux, souvent inaccessibles, cachés et défendus
par des divinités ... la seule qui soit accessible se trouve être la Grotte
d'Astragoth. On sait peu de chose sur cet endroit. Cette grotte mythique se
trouverait quelque part en Asgard. Elle mènerait au cœur du Royaume d'une terrible
divinité, Hel. Je ne sais rien de plus sur Astragoth, mais si Maiegeiam a
trouvé l'entrée de cette grotte, il est certain qu'il y pénétrera pour assouvir
sa soif de pouvoir ! ».



Les mots d'Asturias eurent l'effet d'un choc incommensurable sur l'esprit des
Asgardiens. Siegard était sans voix, tout comme ses amis, à l'exception de
Thrall qui restait imperturbable et qui fut le premier à répondre.



- Ce sont des contes pour enfant, Asturias. Soit tu mens, soit tu nous caches
une partie de la vérité.

- Non Thrall, tu as tort. J'ai lu des choses à …



Siegard serra le bras de Nibel de toutes ses forces sous le regard intéressé de
Macubex qui fut le seul parmi les serviteurs d'Athéna à voir ce court échange.

- … la bibliothèque de Troudheim, celle des conteurs, poursuivit-il en se
dégageant de l’emprise de compagnon. « Certains textes parlent bien de la
grotte du souffle infernal, de la déesse Hel au visage hideux ...Je suis
certain qu'Asturias ne nous ment pas. »

- Je ne vous connais pas, mais vous semblez sincères, vous n'êtes pas armés, je
suis de l'avis de Nibel, ce qui signifie que cette affaire nous concerne. Si ce
mage désire détruire les dieux, Odin est menacé, nous devons l'arrêter, et le
plus vite possible, conclut Siegard en tapant du point sur la table de bois.

- Je commence à comprendre pourquoi vous nous cherchiez, vous espériez que nous
vous conduisions à cette grotte. Las, vos espoirs risquent d'être vains, je
n'ai pas souvenir que nous ayions jamais entendu quoique ce soit sur cette
grotte, hormis dans les contes de Nibel, répliqua Rahotep fouillant dans sa
mémoire pendant que Siegard acquiesçait l'air grave.

- Peut-être que si nous analysions les textes ...., se risqua Akurgal l'air peu
convaincu en sortant de son sac qui ne le quittait jamais un recueil de titres
qu'il avait soigneusement compilés depuis son arrivée en Asgard.

- Allons demander au prêtre de Thor, c'est un grand érudit, il connaît le
langage des runes sacrées, proposa enfin Nibel après un temps de cogitation.



Le prêtre ne put apporter grand-chose de nouveau si ce n'est un poème traitant
de la Bouche des Âmes, repaire funeste de l'Œil aux bras multiples. La Bouche
des Âmes évoqua tout de suite les enfers pour les plus érudits, mais la seconde
partie de l'énigme dut attendre une nuit de réflexion commune pour trouver
enfin une réponse.



- Qu'est-ce que c'est que cette histoire ! soupira Thrall d'un air agacé après
une nouvelle remarque d’Inyan. « Ne dis pas n'importe quoi pour te rendre
intéressant auprès de ton frère, nous n'avons jamais affronté une serpent à œil
avec des tentacules ! »

- Toi non, car tu étais gravement blessé sombre idiot !



Se retournant vers l'assemblée Inyan reprit calmement.

- Après l'attaque du camp, dans la forêt des Elfes Noirs, j'ai été cherché des
plantes pour vous soigner. J'ai trouvé ce que je cherchais dans une grotte
étrange où j'ai croisé cette créature infernale. Cette grotte transpirait le
mal, la mort. Je suis certain que c'est Astragoth !

- Tu as croisé un Helmodi, comment ai-je pu passer à côté ... Mon songe, j'ai
vu Cléops quand tu étais dans cette grotte, j'ai accouru vers toi car j'ai
senti un grand danger. C'est une certitude, cette grotte est celle que nous
cherchons, répondit Akurgal en consultant son journal personnel.

- Comment connais-tu cette bête ? demanda Yshba que tout le monde avait presque
oublié tant il restait en retrait.

- Dans mes lectures, à la recherche de potentiels adversaires au service de nos
ennemis ...

- Pourrais-tu nous conduire là-bas ? questionna Mâa ravi de voir que l'enquête
était proche de son dénouement.

- Je retrouverais certainement la route de cette grotte. Mais retourner dans
cette maudite forêt ... Nous avons tous failli y laisser nos vies la dernière
fois, ce ne sera pas périple aisé.

- La vie d'Odin le commande, nous n'avons pas le choix, rétorqua Siegard
résigné.

- Ne vous en faites pas : nous sommes mieux préparés, plus endurants, avertis
des dangers, ce ne sera pas la même chose !



Les paroles de Memnoch réconfortèrent visiblement les guerriers d'Asgard,
désireux pour certains de prendre une revanche sur quelques Elfes Noirs, du
moins de ne pas trop affoler les serviteurs d'Athéna qui devinaient peu à peu
les dangers à venir.







Crépuscule éternel








- Voilà des heures que nous avons quitté Troudheim et c'est étrange le soleil
ne semble pas devoir se lever ... nous sommes pourtant en pleine journée.
Depuis que nous nous sommes rapprochés d'Asgard il est clair que l'astre de Râ
nous a abandonné. Il n’émerge plus, pas même quelques instants, c'est quelque
chose de vraiment intriguant. Tu as peut-être pu en apprendre davantage Rahotep
?

« A vrai dire Mâa, je suis resté longtemps dans l'ignorance comme toi. Comme
Egyptien, j'ai eu du mal à ne pas voir le soleil nous réchauffer de ses rayons
bienfaiteurs, alors j'ai recherché des réponses avec Akurgal, mon compagnon
mésopotamien. »



Ce dernier prit la parole en dégageant son visage de la laine qui empêchait le
froid de s’immiscer dans ses poumons.

- J'ai en effet aidé Rahotep dans sa recherche et je pense avoir trouvé une
explication satisfaisante. Le mot Asgard signifie selon les runes sacrées « la
demeure des Ases ». Tout ce que nous avons pu apprendre pour le moment sur ces
Ases c'est qu'Odin en est le chef, visiblement le chef de famille. Les terres
entourant Asgard sont aussi appelées Midgard, « l'enceinte du milieu ». Nous
pensons que les dieux d'Asgard, donc Odin et les siens, ont construit une sorte
de grande muraille invisible pour nos yeux, destinée à protéger leurs terres
des autres dieux. En Mésopotamie, ma cité d'Ur est elle-même ceinte d'une telle
muraille. Ainsi le soleil de Râ et de Shamash ne parviendrait pas à passer
assez haut dans le ciel pour dépasser cette muraille.

- Mais, compléta Rahotep en resserrant autour de lui son manteau de fourrure
pour se protéger du vent glacial, parfois, en été, lorsque la puissance de nos
dieux est à son zénith, le soleil peut monter plus haut dans le ciel et alors
éclairer plus longtemps Asgard.



Mâa fit une moue songeuse, avant qu'un éclair lui traverse l'esprit.

- Cela expliquerait pourquoi la glace et la neige règnent en maître partout !
Le soleil n'est jamais assez puissant pour les faire fondre ! C'est aussi une
superbe défense contre les autres divinités : qui voudrait d'une terre stérile
et froide ! Odin semble avoir trouvé une parade originale face aux ambitions
d'autres dieux.

- C'est aussi ce que nous pensons Mâa, mais il reste beaucoup encore à
apprendre sur cette terre, je pense que nous ne sommes pas au bout de nos
surprises.



Soudain, alors que les trois compagnons poursuivaient leur intense
conversation, Yshba et son loup, suivis de près par Meijuk, Memnoch, Liu et
Hanz sortirent de la colonne armes à la main. Yshba s'arrêta net en voyant neuf
bêtes sauvages sortir du sous bois qu'ils longeaient depuis leur départ,
bandant son arc après avoir fiché à ses pieds une dizaine de flèches dans la
neige fraîchement tombée.



- Krenshars, menés par un Loup ensorcelé cracheur de glace, murmura Siegard
d'une voix impassible.

Macubex et Asturias s'étaient déjà mis en garde lorsque Thrall dressa son bras
devant leur poitrine.

- Inutile, vous allez pouvoir constater l'étendue de nos compétences martiales,
vous êtes entre de bonnes mains, dit-il dans un sourire qui en disait long sur
sa confiance.



Memnoch plongea sa main dans son manteau, imité par ses trois compagnons. Une
impression de froid intense le saisit lorsque la garde de son épée s’anima de
violentes saccades d'énergie. Progressivement, les épées de Liu et Memnoch, les
haches d'Hanz et de Meijuk irradièrent d'une énergie que même les serviteurs
d'Athéna pouvaient ressentir. Cette dernière était un savant mélange de chocs
électriques et de froid glacial, plus glacial encore que le blizzard qui
redoublait d'intensité. La lame de Memnoch, longue de près d’un mètre, était
ainsi auréolée d’un faible halo de lumière blanche lorsqu'il la brandit. Le
guerrier redressa lentement son visage, ses deux poings serrés sur le pommeau
d’argent finement ciselée, et fit face aux Krenshars, lesquels se tenaient
prêts à passer à l’attaque.



Les adversaires se jaugeaient patiemment, et, si les yeux des monstres exprimaient
une sauvagerie et une folie à peine maîtrisées, les guerriers d'Odin, eux,
semblaient parfaitement concentrés ; les traits impassibles de Liu trahissaient
toutefois la tension qui l’animait, et son regard noir faisait écho aux yeux
vermillons de son ennemi direct, un Krenshar de près de deux mètres au garrot,
au pelage blanc, tacheté de noir, une crête rougeâtre courant le long de la
colonne vertébrale de cet animal qu'on eut dit sorti des enfers. Aussi véloce
qu'une violente rafale de blizzard, l'animal s’élança soudain, droit dans sa
direction : en un instant deux dards empoisonnés filèrent irrésistiblement,
accompagnés d’un léger sifflement. Incapable de les éviter, le Krenshar fut
atteint en pleine tête et en quelques instants fut pris de convulsions qui
l'accompagnèrent jusqu'à son trépas. De son côté, Yshba avait déjà criblé de
flèches deux autres monstres, tandis que Meijuk pourfendait à son tour la tête
des trois adversaires qui s'étaient jetés sur lui. Memnoch attendit sans
broncher son adversaire jusqu'au dernier instant, respirant ainsi l'haleine
fétide au moment où il pivota, et, profitant d’une faille dans la garde du
Krenshar, l’embrocha proprement : l’épée transperça le côté du monstre et
s’enfonça de toute sa longueur avec un raclement strident, lequel était couvert
par le grognement sonore de la créature. Un sang aussi sombre que le jais
s’écoula bientôt à gros bouillons depuis la plaie béante.



Hanz, quant à lui, avait eu fort à faire face au loup générant des souffles
givrants à chaque fois qu'il ouvrait sa gueule menaçante. Après avoir étudié
les phases d'attaques de l'animal, Hanz trouva la faille, tranchant net les
pattes avant du monstre. Il prit le temps de regarder droit dans les yeux le
loup ensorcelé, le contournant lentement, tandis que ce dernier régurgitait
sporadiquement d’épaisses glaires noirâtres comme si son corps ne supportait
pas la douleur infligée et demandait une mise à mort rapide. D’un unique revers
de son arme, il le décapita. . Un sourire fugitif naquit sur les lèvres de
Thrall, en voyant Yshba achever de ses traits les derniers adversaires.



« Et oui, nous sommes prêts à affronter n'importe qui, serviteurs d'Athéna »,
murmura-t-il, tandis qu'Asturias et Macubex prenaient petit à petit la mesure
des progrès accomplis par leurs anciens compagnons.



La suite du périple se passa sans encombre. La Forêt des Elfes Noirs fut
atteinte au bout de quelques jours. Les aventuriers n'avaient plus croisé de
signe de vie autre que végétal ce qui inquiétait beaucoup Siegard. Même Yshba
semblait de plus en plus tourmenté, en fin connaisseur de la nature, il savait
que cette absence de vie ne laissait rien présager de bon, d'autant que Lupus,
son fidèle compagnon montrait des signes de nervosité inhabituels. La voie à
suivre demeurait cependant claire et c'est Inyan qui ouvrait la marche en
compagnie de son frère.



- Frank, une chose m'intrigue, commença le premier pour rompre la monotonie
d'une marche à travers une forêt inquiétante, puante et étrangement silencieuse,
« pourquoi vous ne portez aucune arme? »

- C'est interdit.



Interloqué, Inyan tenta d'en savoir davantage, même si Frank ne semblait pas
disposé à trop en dire, même à son frère, suivant en ce sens les
recommandations de Yolos avant leur départ pour l'Egypte...

- Interdit ? Et si vous êtes attaqués ? Tu as bien vu l'autre jour, face aux
Krenshars ...

- Nous avons appris des techniques de combat à main nue très efficaces, un peu
comme Séléné, tu te souviens, à Hattousa, avec Choun Lee, le vieux maître en
arts martiaux.

- Ouais ... rétorqua Inyan peu convaincu. « Enfin, je préfère avoir une belle
épée de glace, une belle rondache, une belle armure bien rembourrée comme la
nôtre plutôt que d'être comme toi, à peine protégé par une armure de cuir et un
manteau de peau. Reste à côté de moi si ça chauffe, je te protégerai, comme
d'habitude ! »

- OH ! Regardez ! C'est le campement ...



Comme Nibel, tous les regards convergèrent vers les restes d'un campement
totalement dévasté, dont il ne restait plus que quelques lambeaux de tente, un
foyer dispersé au gré des combats et un ensemble de barricade totalement
pulvérisé. La nature semblait avoir figé pour l’éternité ce champ de bataille,
l’enserrant dans un linceul de givre protecteur.



« Ça me fait drôle de revenir ici », dit Liu le regard perdu dans le vide,
repensant au terrible combat qu'il avait vécu ici même avec ses amis lors du
périple qui devait les mener à la forteresse d'Odin des mois auparavant.

- Moi, ça me donne la chair de poule ... j'espère ne jamais revoir d'arbre
géant ou de sorcier, j'ai failli y laisser mes os !

- Contrôlez-vous. Du temps a passé, nous sommes plus forts maintenant. Aidez
donc Meijuk à remonter un camp, nous allons nous installer ici. Inyan a indiqué
que la grotte ne se trouve qu'à quelques encablures, nous la rejoindrons
demain, après une bonne nuit et un bon repas.

- Tu ne penses pas que cela soit trop risqué Siegard ? s'avança Nibel qui avait
rejoint les trois hommes.

- Risqué ou pas ... nous n'avons pas le choix. Odin veille sur nous, ayons
confiance.



Le vent ne soufflait pas. Les animaux se terraient. Seule une nappe de
brouillard s'aventurait entre les arbres. Le seul son audible était celui de
murmures, lointains, morbides, glaçant le sang de tous les élus présents. Ils
n'avaient rien à craindre, personne ne viendrait les attaquer, car c'est bien
l'Au-Delà en personne qui semblait veiller sur eux en cette ultime soirée.



***




Dans une crypte, quelque part au cœur d’une ténébreuse forêt asgardienne



- Nos forces ont accompagné la marche des guerriers, Ô Divine Etoile de
Sagesse.

- Très bien Eljoudilhen, je n’en attendais pas moins de toi. Veille à ce que
rien ne puisse troubler le rituel.

- Il en sera fait selon vos désirs. Personne ne se mettra en travers de leur
route.









La Marche de l'Au-Delà








Inyan arriva en vue de la roche qu'il avait repérée à la suite du combat qui
avait failli leur coûter la vie il y avait de cela des mois maintenant. Elle
était bordée d'un gouffre d'où provenait un vent violent, accompagné d’un
murmure qui arracha des frissons à l'ensemble des élus. Après quelques minutes,
la file humaine conduite par Inyan parvint devant l'entrée de la grotte qu'ils
pensaient être celle d'Astragoth.



« Méfiez-vous. Le sol sera assez glissant et la dernière fois le Helmodi
m'attendait. Je pense qu'il avait dû m'entendre arriver, donc soyez sur vos
gardes », dit Inyan en dégageant son glaive de son fourreau, suivi par
l'ensemble des guerriers d'Odin tandis que les serviteurs d'Athéna tentaient de
mettre à profit les enseignements de Yolos et d'éveiller leurs sens.



Inyan pénétra à l'intérieur de la caverne en se préparant au combat et, tendant
son bras gauche, éclaira la cavité avec la torche qu'il avait pris soin
d'allumer, à l’instar de ses amis, afin de mieux discerner le danger dans la
pénombre naissante.



« C'est infect comme ça pue ! » suffoqua Memnoch en portant sa main à la bouche
pour ne pas vomir.



Après quelques instants de marche, les aventuriers se rendirent compte qu'ils
ne voyaient plus l'entrée de la caverne. Désormais, la seule lueur de leurs
torches éclairait leurs pas. A leurs pieds, des racines noires et tortueuses
émergeaient de manière de plus en plus régulière au fur et à mesure que le
groupe s'engageait dans les entrailles de la terre. En fin connaisseur, Liu
remarqua tout de suite le poison suintant au bout des épines qui recouvraient
les racines et avertit ses compagnons.



- Attention au poison. Cette odeur m'est familière, c'est celle d'un violent
poison, les Larmes de Shiva si mes sens ne me jouent pas de tour.

- Ce que tu avances me semble bien étrange Liu, Shiva est une divinité de ma
terre natale d'Inde. Comment un tel poison pourrait se retrouver ici ?
questionna Shiro en fronçant les sourcils.

- Je n'en sais rien, répliqua Liu visiblement gêné, « mais c'est du poison, ça
c'est certain. »



Tenant compte des observations de Liu, le groupe avança avec la plus extrême
prudence pendant de longues minutes. Le tunnel s’enfonçait ainsi dans
l’obscurité. Des traces étranges et visibles au sol indiquaient que la vie
avait trouvé ici un refuge improbable. Après avoir parcouru plusieurs centaines
de pas, le groupe arriva dans une vaste cavité remplie de stalactites. Le sol
était maintenant recouvert d’ossements et d’une fine brume noirâtre qui
évoluait doucement au-dessus des pierres glissantes et des racines toujours
menaçantes. Nibel remarqua le premier un mur lisse qui courrait le long d’une
des parois, « comme les fondations d’un temple » souffla-t-il. A demie-cachée
dans un entassement de cristal, une rampe menait vers une grande porte aménagée
à même le mur. Cette dernière était ouverte, les aventuriers s’y engouffrèrent
prudemment. Le couloir était envahi par l’étrange végétation et se poursuivait
sur une centaine de mètres, jusqu'à déboucher dans une impasse. Un énorme
rocher bloquait le passage. Son contact était froid et lisse, quelques runes étaient
gravées à hauteur d'homme. Akurgal et Rahotep s'empressèrent de les traduire.



- « Ceci est la porte que nul ne pourra détruire dans un acte de violence ».

- Charmant ! Akurgal, tu es certain de ta traduction ?

- Oui, répondit Rahotep, « c'est bien cela Thrall. Cette roche n'est pas là par
hasard. »

- Il s'agit d'une porte, peut-être mise en place par le Mage des mages, par
Maiegeiam en personne. Il aurait deviné que nous finirions par le retrouver,
nous ou d'autres, et se serait ainsi protégé ? proposa Shiro en cherchant des
signes particuliers sur les bords de la pierre, en vain.

- Nous voilà bien avancés en tout cas ! Comment allons-nous faire pour passer ?

- Peut-être qu'il ne faut pas passer, peut-être que c'est une protection ... je
ressens des ondes étranges dans cette grotte, je ne suis pas tranquille. Cet
endroit me rappelle la Forêt des Morts, là où nous avons croisé la route de
l’Indicible …

- Je suis d'accord avec toi Mâa, compléta Macubex, « cette roche, cette grotte,
cette porte, quelque chose cloche, c'est un piège. »

- Ecoutez, serviteurs d’Athéna, nous n'avons pas fait tout ce voyage pour rien
alors on va chercher et trouver un moyen de passer !



Comme Thrall éructait de colère, Yshba se rapprocha de la pierre, brandissant
sa hache et l'abattant soudainement contre la roche. Au début, il n'y eut rien,
mis à part un craquement funeste suivit d’un silence total, ce qui provoqua
l'hébètement chez les élus.



- Qu'est-ce qui te prends ? Tu as perdu la raison ? Tu ne risques pas de
détruire cette roche avec ta hache, et en plus tu fais un bruit énorme ! OH !
Réponds-moi, vociféra Meijuk en secouant Yshba qui demeurait silencieux, les
yeux simplement écarquillés et livides.

- Quel idiot ! pesta Mâa, avant qui Ryusei ne le bouscule.

- Toi, tu n'insultes pas mon ami !

- La ferme Liu, je vais te crever ! hurla Shiro dans un accès de rage.

- Le poison ... murmura Liu, le poison ! « Vite, il faut fuir cet endroit, nous
sommes intoxiqués, nous respirons du poison, nous allons sombrer dans la folie
! »



Au même moment, dans un nouveau craquement sourd, la roche frappée par Yshba se
fendit en deux, en vingt, en cent, en milliers de morceaux qui volèrent en
éclats propulsant l'ensemble des compagnons contre les parois de la caverne.
Comme chacun reprenait peu à peu ses esprits, Yshba remarqua rapidement que son
annulaire droit portait un anneau. Tout à sa surprise, il releva la tête et
assista, impuissant, au spectacle qui se déroulaient sous les yeux terrorisés
des élus. Un long murmure venant du fond de la terre se propagea sous la forme
d'un souffle qui se dirigea tout droit vers la sortie de la caverne, avant de
monter droit dans les cieux. En quelques instants, la Terre entière fut plongée
dans le noir, une onde de choc propulsant tous les êtres vivants au sol,
rendant les animaux fous, les hommes croyant assister à la fin du monde. A des
milliers de kilomètres de là, Yolos et Graal avaient revêtus leurs Armures
Sacrées, se préparant au pire, scrutant l’horizon à la recherche de la source
qui dégageait un pouvoir si écrasant. Dans la grotte, le calme était maintenant
revenu, il n'y avait plus qu'un murmure continu qui annonçait le pire.



« Qu'avons-nous fait ? » s'inquiéta Asturias en cherchant dans ses souvenirs,
dans ses lectures anciennes une explication rationnelle à ce phénomène.



Dans la pénombre, des bruits inquiétants grandissaient maintenant, sans qu'il
fut possible de les reconnaître. Pourtant les élus en étaient tous convaincus,
des adversaires marchaient sur eux, le danger étaient de plus en plus palpable,
leurs sens ne pouvaient les tromper.



- Restons groupés, serviteurs d'Athéna, restez au centre, vous n'avez pas
d'arme vous ...

- Occupe-toi de tes affaires Thrall, coupa Macubex. « Crois-moi, nous n'avons
rien à vous envier. »



Pendant quelques instants qui parurent durer une éternité, les compagnons
attendirent la confrontation. Dans la pénombre, Hanz fut le premier à
distinguer une main autour de laquelle gravitaient cinq sphères incandescentes.



« Seigneur Odin, veille sur tes serviteurs », pria-t-il avant d'hurler de
toutes ses forces : « A TERRE, TOUS A TERRE !!! »



Suivant le mouvement du bras tendu, les sphères s'envolèrent en une nuée de
météores, traçant dans la caverne un sillon d'étincelles avant d'exploser au
milieu des guerriers qui furent une nouvelle fois projetés contre les parois
hérissées de racines empoisonnées.



Shiro se releva le premier, prudemment. Le feu sacré ne l'avait pas touché, car
il avait discerné au dernier moment la trajectoire des boules d'énergie et
avait plongé du bon côté pour les éviter. Il ne put cependant rien contre le
Helmodi qui se maintenait face à lui et qui le transperça de ses rayons
d'énergie négative. A quelques mètres de là, tandis qu'un squelette s'acharnait
sur les corps de Thrall et d'Inyan, utilisant le second pour frapper le
premier, Mâa, Nibel, Siegard et Asturias affrontaient à présent un démon noir.
A plusieurs reprises, ils avaient réussi à esquiver le dard mortel de la queue
empoisonnée, et avaient frappé le démon noir, mais les puissantes griffes et
les redoutables mâchoires du monstre avaient réussi à endommager leurs armures,
leur infligeant plusieurs blessures. Le poison poursuivait en outre son ouvrage
et les forces quittaient peu à peu les combattants engagés dans un combat
inégal. Siegard se jeta une nouvelle fois au devant du démon, suivi du regard
par Asturias qui tentait de relever Nibel avec l'aide de Mâa.



Siegard surmonta l'engourdissement causé par le poison des racines, évita les
deux mains griffues du démon noir et plongea sur le côté, contournant son
adversaire et lui assénant un coup terrible sur la colonne vertébrale. La
créature hurla tandis que le glaive du guerrier d'Asgard irradiait d'un froid
intense au plus profond de son être. Une douleur fulgura alors le corps de
Siegard, suivie par la brûlure intense d'un nouveau poison. Sortie de la
pénombre, une femme à la beauté irréelle venait de le frapper dans le dos d'une
dague empoisonnée. Il se mit péniblement à genoux, puis releva la tête pour
regarder cette femme qui s'avançait lentement, un rictus vicieux sur son visage
d'une blancheur cadavérique. La dernière chose que vit Siegard fut la main de
cette femme, qui, d'un geste tranquille, fit apparaître un trait de lumière
entre les jambes du fier guerrier. Une barrière de lames se matérialisa
soudainement, déchiquetant Siegard qui fut bientôt réduit à l'état de bouillie
sanguinolente sous le regard épouvanté d'Asturias et de Mâa qui venaient à son
secours.



« Cessez ! Vous avez assez joué avec nos sauveurs. Quittez donc ces lieux et
allez retrouver votre liberté. Le monde vous appartient maintenant ! »



Un homme à l'allure royale, portant un diadème de diamants, suivi par une
superbe femme à demi-nue et tenant son bras gauche, contemplaient la scène sans
laisser transparaître la moindre émotion.

- Voici donc les Mortels qui nous ont libérés, mon amour. Ils ne semblent
pourtant pas extraordinaires, réduits à l'état de simples jouets face à de
petits démons.

- Ne te fie pas aux apparences, ma douce. Je pense que nous en recroiserons
certains sur notre route.

- Qui êtes-vous ? Servez-vous l’Indicible ? demanda Asturias en serrant les
dents de rage devant ce qui venait de se produire.

- Je pardonne ton insolence, Mortel. Tu ne peux savoir que tu es en présence de
divinités qui vont en terminer avec ce monde décadent. Je suis Bhaal, et voici
ma compagne, ma chère Anat. Mais peut-être qu'ainsi tu nous reconnaîtrais, du
moins nous montrerais-tu plus de respect !



En quelques secondes, dans un grand éclat de lumière Bhaal prit la forme d'un
terrifiant démon, tandis qu'aucun des élus ne pouvaient supporter la vision
d'Anat, être revêtant pour chacun le pire cauchemar qu'ils aient jamais
imaginé, leur propre mère putréfiée et dévorée par d'immondes insectes. Un
instant, le regard des deux divinités se porta sur Yshba et sur l'anneau qu'il
portait, puis Bhaal reprit d'un ton monocorde.



« Vous venez d'ouvrir la porte qui nous retenait prisonniers depuis les temps
les plus anciens. Maintenant, les dieux qui nous y avaient menés vont payer
leurs crimes, ce monde va sombrer dans la terreur éternelle, jusqu'à ce que
notre soif de vengeance soit épanchée. Alors, et alors seulement, nous créerons
un nouveau monde à notre image. Pour vous remercier de votre acte, nous vous
laissons la vie, dans ce nouveau monde de cauchemar. »



Bhaal disparut promptement dans un souffle glacial, laissant Anat seule avec
les élus.



« Mon époux est bien trop dur avec vous. Votre ami est mort, vous le regrettez
déjà, laissez-moi donc vous mener à lui ! »



Plongeant sa main dans son cœur, Anat fit jaillir un sang noirâtre qui prit
rapidement la forme d'une tornade emportant tous les héros dans un vortex où
les corps s'entrechoquèrent pendant de longs instants de douleurs. Chacun put
entrapercevoir en visions la douleur de populations tourmentées par des morts
revenus à la vie, par des démons innombrables, des humains sombrant dans la
folie, le cannibalisme, des actes de débauches pire encore, détruisant leur
propre monde ...



***




Un corps inanimé gisait sur le sol. Ce dernier était crevassé, recouvert de
cendres. Une odeur de sang et d'excréments réveilla bientôt cet inconnu. Au
loin, il put entendre ... « Ton Âme, ton Âme ... » Dans un grésillement de
chair brûlée, un guerrier s'avançait, arme à la main, l'autre se portant devant
le nez et la bouche pour ne pas respirer plus longtemps les gaz et fumerolles
putrides ... Un autre humain déambulait au milieu d'une vaste plaine, où les
rochers semblaient composés de visages grimaçant de douleur et de terreur, au
rythme du clapotis d'un sang visqueux donnant la nausée ... Une ombre
s'avançait, comme des millions d'autres, vers un trou béant surmontant une
montagne. Le visage triste, la voilà qui se jetait à son tour dans le tumulte
de ce gouffre, mêlant sa peur à celle de ces millions d'êtres humains venant de
perdre la vie ... Une nouvelle ère venait de commencer.







FIN DU LIVRE II


chapitre précédent - chapitre suivant







Recopier le nombre avant d'envoyer votre formulaire.




© 2002-2010 Animecdz. Tous droits réservés. Saint Seiya © Toei Animation, Bandai et Masami Kurumada