FAQ
![]()
Saint Seiya
![]() Figurines
![]() Fanfics
![]() Fan Arts
![]() |
Cette fiche vous est proposée par : Johnny La Confession
La Sibérie orientale, dans l'Empire russe La température était extrêmement rigoureuse au beau milieu de l'automne. Le paysage était déjà couvert par la neige et la glace, et un vent froid et sec parcourait toute la Sibérie orientale, rendant cette contrée hostile à toute présence humaine. Pourtant, neuf jeunes garçons, voire neuf jeunes hommes, étaient en train d'errer au beau milieu du paysage. Parmi eux se trouvait un jeune homme d'une vingtaine d'années, aux cheveux bleus et courts et au regard froid, qui semblait ignorer les impitoyables conditions climatiques auxquelles il faisait pourtant face. Derrière lui, trois jeunes hommes entre seize et dix-huit ans, l'un aux cheveux mauves pâles et aux yeux bleus, l'autre aux cheveux blonds et aux yeux bleus, et un dernier d'apparence plus musclée, aux cheveux noirs et aux yeux marrons, marchaient fièrement, suivis par cinq autres jeunes garçons ayant environ treize ou quatorze ans. Ce curieux cortège se déplaçait à travers les grandes plaines de Sibérie orientale en ignorant pratiquement le froid qui les entourait. Et pour cause; les neuf garçons étaient non seulement des chevaliers sacrés, mais ils s'étaient tous entraînés dans la région pour obtenir leurs armures. Tout à coup, le jeune homme aux cheveux bleus s'arrêta subitement, puis se retourna vers les huit autres chevaliers qui le suivaient. Il s'adressa alors aux trois premiers en ces termes: "Ecoutez-moi, Néhémie, Wim et Moby. Depuis plus de cinq ans que vous suivez mon entraînement, vous ne m'avez jamais déçu et avez amplement mérité vos armures d'argent! Cependant, à l'approche du prochain combat contre les forces du Mal, je veux savoir si vous n'avez pas cessé de progresser après être entrés dans la chevalerie d'Athéna! Aussi, je vais vous faire passer une petite épreuve; utilisez vos attaques fétiches et détruisez ce mur de glace immense qui se tient droit devant vous!" conclut le jeune homme en désignant un épais bloc de glace de son index. "Oui, maître!" répondirent les trois chevaliers d'argent à celui qui n'était autre que le gardien de la onzième maison du Zodiaque, Christian de la constellation du Verseau. Aussitôt, Néhémie de la Coupe, Wim du Dauphin et Moby de la Baleine concentrèrent presque simultanément leurs cosmo-énergies, puis se mirent à crier: "Par le Tonnerre de l'Aube!" "Aquatic Thunder!" "Kaitos Spauding Bomber!" Les attaques des trois chevaliers d'argent se concentrèrent alors en un seul point, qui prit la forme d'une énorme vague bleue foncée et percuta rapidement le mur de glace. Pendant trois secondes, il ne se passa rien, puis des fissures apparurent sur le mur, qui commença à craqueller peu à peu, puis à trembler, menaçant de s'effondrer d'un instant à l'autre. Prenant conscience du danger, Christian hurla à ses huit compagnons: "Ecartez-vous!" Les chevaliers de bronze et d'argent obtempérèrent immédiatement et coururent droit devant eux sans se retourner, n'entendant que le bruit du mur qui s'écroulait en plusieurs blocs de glace. Ils coururent pendant près de vingt secondes, jusqu'à ce que tout danger fût écarté. Le chevalier du Verseau poussa un soupir de soulagement: "Ouf! En fin de compte, il y eut plus de peur que de mal! Mais au moins, j'ai pu vérifier que vous étiez au point! Je n'ai plus rien à vous apprendre, j'espère juste que vous êtes attentifs aux disciples que vous aviez commencé à entraîner alors que vous n'étiez pas encore des chevaliers d'Athéna!" L'un des chevaliers de bronze, Dicus du Triangle austral, répondit au chevalier d'or: "Ils s'en sortent bien...En tout cas, Wim est un maître exigeant, mais juste envers moi!" "Tant mieux...L'imminence de la prochaine Guerre Sainte avait contraint le Grand Pope à faire entraîner des chevaliers de bronze par des quasi-chevaliers...Si leurs enseignements et les miens ont porté leurs fruits, cela vaut mieux pour nous tous. Bon, je pense que nous pouvons désormais rentrer au Sanctuaire..." Tout à coup, l'un des chevaliers de bronze, Henrik de la constellation du Cygne, demanda à Christian: "Chevalier du Verseau, j'aimerais vous poser une question assez particulière..." "Et quelle est cette question, Henrik?" "Eh bien, poursuivit le chevalier du Cygne, je vous ai entendu hier parler avec maître Néhémie des royaumes des glaces, au-delà du Grand Nord...De quels royaumes parliez-vous?" Christian resta silencieux pendant un bref moment, avant de répondre: "Des trois royaumes que j'ai évoqués avec Néhémie, celui que je connais le mieux est le royaume des terres de Blue Graad. A l'origine, il s'agissait de chevaliers sacrés, maîtrisant l'eau et la glace comme moi, qui avaient été chargés par Athéna de surveiller l'urne où était enfermée l'âme du dieu Poséidon. Ces guerriers se sont ensuite affranchis de la tutelle de notre déesse, se sont rebaptisés les "Blue Warriors" et vivent depuis en autarcie. La rumeur prétend qu'ils auraient disparu à la suite d'une vague de froid intense, mais je n'y crois guère...Le deuxième royaume est Asgard. Je ne connais pas grand-chose de ce domaine, si ce n'est que ses habitants ont pour dieu protecteur Odin, dieu des dieux de la mythologie nordique et que ce royaume est protégé par sept combattants d'élite, aussi puissants que les chevaliers d'or!...Quant au troisième, il s'agit là du royaume le plus mystérieux, dont je ne connais que le nom...Il s'agit du royaume de Skygard, un royaume dont les limites sont difficilement cernables! Mais l'on dit que ce royaume renfermerait quelque chose de vital pour la survie de l'humanité et que ce serait une catastrophe s'il tombait entre de mauvaises mains!" "Vraiment, chevalier?" demanda Henrik. "Exactement...cela dit, je ne sais rien de plus au sujet de ce mystérieux domaine...Bon, il est inutile de nous attarder davantage, retournons au Sanctuaire." Les neuf chevaliers reprirent aussitôt leur marche dans la Sibérie enneigée, afin de regagner le domaine sacré de la déesse Athéna. ************ La neige couvrait la quasi-totalité du paysage, seuls deux ou trois arbres avaient pu subsister, mais ils étaient dépourvus de leurs feuilles. Si un palais lumineux n'avait pas surplombé la région, l'on aurait aisément pu dire qu'elle n'appartenait pas à l'Oekoumène. Le palais en question était comme taillé dans la roche glacée, mais une lumière quasi-surnaturelle l'illuminait, donnant par la même occasion un repère aux infortunés voyageurs. Devant l'entrée du palais, un homme âgé, vêtu d'une épaisse tunique indigo et portant une barbe et des cheveux gris, regardait le paysage avec préoccupation; ses yeux étaient comme emplis d'inquiétude et il lui arrivait de se tortiller les mains nerveusement. Survint alors près de lui un homme de grande taille, plutôt jeune, aux cheveux blonds et aux yeux bleu acier, recouvert d'une armure sombre, entre l'indigo et le pourpre. Il s'agenouilla devant l'homme âgé tout en lui disant: "Majesté Norst 1er, roi de Skygard, me voici, moi, Harald, guerrier protecteur de ce domaine isolé depuis des siècles. A quoi dois-je l'ordre qui m'a été donné?" Le roi Norst se retourna vers son serviteur et lui répondit simplement: "Harald, l'heure est grave. Mon coeur est dans l'inquiétude." "Pour quelle raison, altesse? Etes-vous inquiet pour le sort de votre peuple, condamné à jamais à l'hiver éternel?" "Je ne suis pas qu'inquiet pour mon peuple, mais aussi pour l'avenir de Skygard, Harald. Ce matin, les devins sont venus me livrer leurs prédictions et ce que mes ancêtres ont toujours redouté depuis deux cent cinq ans va finir par arriver. Et c'est moi, Norst, qui serai l'infortuné spectacteur du drame auquel nous avons été condamnés!" Trouvant abscons les propos de son maître, Harald insista: "De quoi parlez-vous, majesté?" La réponse de Norst fut brutale: "De la destruction de Skygard." "Quoi?! Etes-vous sûr de ce que vous dites?" Norst soupira: "Harald, tu es vaillant, mais tu es jeune. Tu n'as donc jamais entendu parler de cette prophétie, de cette malédiction qui s'est abattue sur le royaume de Skygard...Regarde le ciel, Harald..." Le jeune guerrier obtempéra et regarda le ciel étoilé pratiquement en permanence toute l'année dans Skygard, où le soleil n'apparaissait jamais, pas même temporairement, à l'inverse du royaume voisin d'Asgard. Son regard tomba alors sur l'étoile polaire, et ce qu'il vit l'étonna: "C'est curieux, majesté...Par rapport à la Terre, l'étoile polaire devrait être décalée d'un degré, pourtant son angle se rapproche du zéro..." "Elle en est encore plus proche qu'hier et bien moins que demain, précisa Norst. C'est un mauvais présage qui s'annonce..." "Quel mauvais présage?" "Celui de la prophétie, Harald." répondit simplement Norst. Et dans la seconde qui suivit, le roi de Skygard récita machinalement et solennellement: "Quand l'angle zéro l'étoile polaire atteindra Harald s'était mis à trembler tout le long de son corps en écoutant les paroles de son roi. La fameuse prophétie l'avait profondément bouleversé, aussi mit-il près d'une minute avant de reprendre ses esprits et de demander à Norst: "Altesse, je...j'aimerais en savoir plus...Dans quelles circonstances cette prophétie est-elle survenue?" Et le roi de Skygard de répondre: "Suis-moi dans mes appartements, Harald...Nous y serons plus à l'aise pour parler de ce que personne ne pourra empêcher, pas même toi, mon vaillant guerrier..." ************ Trevor Dieu m'en est témoin, je ne suis pas au bout de mes surprises...D'abord ces chevaliers d'Athéna, maintenant cette contrée enneigée du nom de Skygard...Mais au fait, il y a quelque chose qui m'intrigue chez John...Autant lui poser la question directement: "John!" "Oui, révérend?" "Comment se fait-il que vous puissiez me parler de ce royaume de Skygard et de cette conversation entre ce roi Norst et son serviteur? Pourtant, vous n'étiez pas avec eux!" Je ne fus guère satisfait de la réponse que me donna le fils de mon défunt ami Etienne: "C'est à cause de lui, révérend...Mais comme je vous l'ai dit, je préfère retarder le moment où je vous dévoilerai son identité...Il me suffit d'entendre son nom dans ma tête pour que je me sente mal derechef..." Je m'y résolus donc et laissai John reprendre son récit...Il m'évoqua alors un dialogue entre lui et sa mère, juste après le traditionnel repas dominical des Roligny. ************ Malgré les abondantes provisions fournies par les gardes du Sanctuaire, les Roligny et le révérend Valnoy mangèrent frugalement, conformément à l'austérité puritaine qui se retrouvait jusque dans leurs habitudes alimentaires, les faisant se contenter du strict nécessaire pour se sustenter. Après le repas et une prière à Dieu, Etienne Roligny fit part de ses intentions: "Catherine, John, révérend, je vais me promener dans les environs du Sanctuaire, puisque le repos dominical nous le permet. Je vous laisse faire ce que bon vous semble pour l'après-midi, bien que je connaisse déjà vos intentions en la matière, révérend..." Valnoy ne répondit pas, mais le négociant huguenot savait bien que le précepteur de son fils ne voudrait jamais se mêler à des serviteurs d'une déesse de l'Antiquité, des jeunes gens qu'il avait qualifié d'"idolâtres" tout au long de la matinée devant Catherine Roligny. Cette dernière, une fois que son époux fût parti, s'adressa à son fils en ces termes: "Dis-moi, John, comment s'est passée ta promenade dans les environs du Sanctuaire, ce matin?" Le jeune homme attendit cinq secondes avant de répondre: "Elle s'est passée plus ou moins bien, ma mère. J'ai côtoyé aussi bien des chevaliers d'une rare sympathie, comme Shad de la constellation du Taureau ou Daniel de la constellation du Lion, que des chevaliers bien peu amicaux, notamment le chevalier des Gémeaux, un dénommé Bosching..." "Je vous l'avais dit, Catherine! intervint le révérend Valnoy. L'on ne peut se fier à de pareils individus!" "Ils n'étaient pas tous comme lui, révérend, précisa John de nouveau. Ceci étant dit, j'ai été assez marqué par un chevalier de bronze, un certain Lévi de la Licorne..." "Il se trouve donc des Juifs parmi les chevaliers d'Athéna, John?" demanda Catherine à son fils. Le révérend Valnoy lâcha: "Bon...S'il s'agit là d'un Juif, passe encore, après tout, Jésus-Christ est bien né à Bethléem, en Judée...Il est quand même regrettable que les Juifs n'aient jamais voulu reconnaître en l'un des leurs le Messie, le fils du Dieu béni! Mais cela vaut mieux que ces païens qui servent cette Athéna et oublient qui est le vrai Dieu!"acheva-t-il dans un mouvement d'humeur. "Lévi, ajouta John, m'a affirmé qu'Athéna avait été envoyée par Dieu, et qu'il s'agit là d'une chose qui se produit tous les deux cents ou trois cents ans!" A ces mots, le pasteur se mit à enrager: "COMMENT?! Je le savais, Catherine, nous n'aurions jamais dû rester ici! Ah, si je n'étais pas aussi rétif à côtoyer ces mécréants, je ne me priverais pas de dire deux mots à ce chevalier! Je m'en vais immédiatement retourner dans ma chambre et prier Dieu pour qu'il nous sorte d'ici le plus tôt possible!" Et, ni une, ni deux, le révérend Valnoy rentra en coup de vent dans la pièce où il logeait depuis peu et en claqua violemment la porte. Seule avec son fils, Catherine lui dit: "John, tu n'aurais jamais dû dire des choses pareilles. N'oublie pas que cette déesse Athéna n'est qu'une idole, malgré l'amour qui semble se dégager d'elle! Seul Jésus-Christ est porteur du vrai amour pour l'humanité, n'oublie pas ça! Faute de quoi, cela peut vouloir dire que tu n'es pas prédestiné à siéger à la droite du Seigneur!" John était resté immobile en écoutant les paroles de sa mère. Penaud, il baissa honteusement la tête, puis répondit: "Je vous demande pardon, ma mère. Je regrette ce que j'ai pu dire..." "Il est trop tard pour exprimer des regrets, John. Tu le sais bien, tu es sauvé d'office ou tu ne l'es pas. Quoi qu'il en soit, profite de l'après-midi pour réfléchir à ce sujet..." "Je le ferai, ma mère. Merci encore." Le jeune homme baisa la main de sa mère, puis quitta leur abri temporaire. Restée seule, Catherine murmura en baissant la tête: "Seigneur, faites que nous ne nous écartions pas du droit chemin et que nous soyons sauvés à la fin de nos jours..." De son côté, John, encore marqué par les remarques de sa mère, songeait: "Heureusement que je n'ai pas parlé du chevalier des Poissons ou du chevalier de la Colombe! Je ne dois pas m'écarter du droit chemin, je suis destiné à m'engager auprès de celle qui m'est promise et je resterai exemplaire!" ************ Au même moment, Etienne marchait insouciamment dans les environs du Sanctuaire d'Athéna. Lui, qui s'efforçait de travailler le plus possible, voire au-delà de ses forces, pendant les six premiers jours de la semaine, profitait désormais du repos dominical régulier, ce qui lui permettait en même temps de rester fidèle au quatrième commandement divin, Le septième jour est un jour consacré au Seigneur, ton Dieu. Le septième jour, tu ne feras aucun ouvrage et observeras le repos voulu par le Seigneur, ton Dieu. Aussi profitait-il de ce moment de détente avec autant de ferveur qu'il en avait pour ses jours de labeur...quand il entra en collision avec quelqu'un errant par là. Levant les yeux au ciel, il recula de deux pas en voyant le corps couvert de coups de son vis-à-vis, un vis-à-vis qui n'était autre que Bosching des Gémeaux, qui avait congédié sans ménagement son fils. Le colon de New Rochelle, qui n'était au courant de rien, s'adressa au chevalier d'or en ces termes: "Vous...Vous êtes couvert de bleus et d'ecchymoses!? Comment est-ce possible?" "Ce n'est que la conséquence de mon entraînement quotidien avec mes disciples, étranger!"répondit froidement Bosching. "Comment ça? Vous...Vous ne respectez pas le Jour du Seigneur?"lâcha Etienne Roligny. "Je n'ai pas le droit de me reposer; le Mal va bientôt revenir sur Terre et les chevaliers d'Athéna devront l'empêcher d'assouvir ses noirs desseins!...Mais au fait, tu ne serais pas l'un de ces naufragés protestants recueillis par Felipe? Ce matin, j'en ai vu un qui m'a grandement contrarié!" Intrigué, Etienne demanda: "Ne seriez-vous pas en train de parler de John, mon fils unique? Je suis Etienne Roligny, fervent chrétien et négociant respectable de New Rochelle!" "C'est bien de lui dont je parle, reconnut le chevalier des Gémeaux. Quant à moi, je suis Bosching, chevalier d'or de la constellation des Gémeaux! Et je dois dire, étranger, que je suis désolé pour toi que tu aies un fils aussi lâche!" "John n'est pas peureux, protesta Etienne, il répugne à la violence, comme nous tous, qui vivons à New Rochelle, colonie des huguenots exilés des pays du Poitou, d'Aunis et de Saintonge!" Devant le ton presque religieux des propos du père de John, Bosching sourit: "Soit...En tout cas, je ne pense pas que cette colonie verra naître un futur chevalier sacré avant des lustres! Je te laisse, étranger, j'ai assez perdu de temps comme ça!" Et le chevalier des Gémeaux de poursuivre sa route. Resté seul, Etienne songea: "Que ce chevalier est antipathique! On dirait qu'il n'a pas de sentiments, qu'il est né pour se battre et rien d'autre! Que l'Eternel lui pardonne son caractère belliqueux!" Après ça, le négociant calviniste reprit sa promenade dans les environs du Sanctuaire. Il marcha pendant quelques instants...quand il vit fondre sur lui une nuée d'oiseaux au plumage sombre et à l'air menaçant. S'affolant subitement, Etienne se jeta à terre, se protégea les yeux de ses mains et pria pour que les oiseaux l'épargnent. Ceux-ci volèrent néanmoins vers lui, becs et serres en avant, prêts à en découdre avec lui, quand une voix se fit entendre: "Arrêtez immédiatement!" Et, comme par magie, les oiseaux firent demi-tour. Etienne mit toutefois quelques instants à reprendre ses esprits, puis se releva et vit une étonnante apparition. Celle d'un jeune homme au teint très pâle et dont les cheveux, les yeux, l'armure étaient aussi noirs que les oiseaux venus attaquer le père de John, des oiseaux qui volaient désormais autour du chevalier sacré, qui dit au colon de New Rochelle: "Etranger, pardonne-moi d'avoir été inattentif, l'espace d'un instant, envers mes corbeaux!" "Ils...Ces oiseaux sont donc à vous?"demanda Etienne, légitimement surpris. "Exactement, étranger. Je suis Edgar, chevalier d'argent de la constellation du Corbeau! Ces corbeaux sont presque mes frères, ils m'obéissent au doigt et à l'oeil!" "Depuis combien de temps êtes-vous chevalier sacré, Edgar?" "Depuis trois mois. J'ai obtenu mon armure sous la tutelle de Daniel, chevalier d'or du Lion...A ce sujet, je me rappelle qu'il m'a convoqué, ainsi que Joseph de l'Aigle et Cristobal du Toucan pour un nouvel entraînement..." "Alors je ne vais pas vous retarder, chevalier du Corbeau. Bonne chance, et que Dieu vous accompagne." "Merci, étranger."sourit Edgar. Le chevalier d'argent partit donc en courant, afin de rejoindre son mentor, laissant Etienne seul. ************ La vie ne nous laisse guère de répit...Quelle amertume pour moi que d'avoir froissé mon précepteur et ma mère...L'on a eu beau me répéter durant mon enfance qu'aucun homme n'avait quitté cette Terre sans avoir commis au moins un péché, il n'empêche, je dois me comporter de la façon la plus exemplaire qui soit...Mais ce dimanche n'est pas vraiment un bon jour pour moi...J'ai été troublé par le visage de cet homme sublime, Eon des Poissons, le parfum et la douceur d'Emma de la Colombe et voilà que je viens de contrarier mon précepteur et ma mère...Mon Dieu, faites que cette angoisse qui me pèse s'évapore...Je voudrais tant, comme mes parents et les autres habitants de New Rochelle, avoir une chance d'accéder à la vie éternelle, de faire partie du petit groupe d'élus auxquels vous accordez votre grâce... J'étais encore complètement perdu dans mes pensées existentielles quand, alors que je relevais la tête, je vis quelqu'un qui ne m'était plus inconnu depuis la veille; Dohko de Rozan, chevalier d'or de la Balance. Je le saluai rapidement: "Bonjour, Dohko, comment allez-vous?" "Tu peux me tutoyer, John, je n'ai même pas dix-huit ans!...En fait, je les aurai le lendemain, le 20 octobre." Je souris: "Soit...Figure-toi que j'aurai 20 ans le lendemain, en ce qui me concerne! Nous sommes donc nés le même jour, mais non la même année!" "C'est exact, approuva Dohko. John, que penses-tu du Sanctuaire?" J'ignore pourquoi et comment, mais quelque chose me dit que je peux me confier à ce chevalier d'or sans problèmes. Peut-être le fait qu'il est né un 20 octobre comme moi, qui sait... "Pour être honnête, Dohko, je me plais bien au Sanctuaire d'Athéna, bien que je sois un fervent chrétien..." "Tu sais, John, me dit Dohko, nous ne sommes pas des païens, comme le laisse entendre ton précepteur! Pour ma part, je suis de confession taoïste, il existe des chevaliers chrétiens de toutes tendances, quelques musulmans comme Omar de Persée, et même quelques Juifs, comme Lévi de la Licorne." "Je l'ai vu ce matin, répondis-je, et je dois avouer qu'il me semble bien rigide..." Le chevalier de la Balance resta silencieux, puis me répondit: "Je ne te contredirai pas sur ce point, John. D'ailleurs, à cause de ce trait de caractère, il n'est guère apprécié par la plupart des chevaliers, qui le trouvent trop...dogmatique." "Peut-être. Sinon, poursuivis-je, j'ai pu côtoyer certains de tes semblables, comme le chevalier du Taureau ou celui du Lion..." "Ils font partie des chevaliers sacrés les plus sympathiques, me rétorqua Dohko. Je m'entends bien avec les autres chevaliers d'or en général, notamment avec Shion du Bélier, qui est avec moi le plus jeune gardien des douze maisons du Zodiaque..." "Et le chevalier des Gémeaux, qu'en penses-tu?"me hasardai-je à demander. "Il a un caractère assez implacable, mais il n'a pas un mauvais fond. D'ailleurs, les chevaliers d'argent qui sont sous sa conduite font partie des meilleurs chevaliers d'argent du Sanctuaire! De toute façon, John, l'on nous a souvent dit, à nous chevaliers d'or, qu'il nous fallait être impitoyables contre le Mal!" Je marquai une pause, puis demandai au chevalier de la Balance: "Et toi, Dohko, comment es-tu devenu chevalier d'or?" "Eh bien, me répondit-il, orphelin à cinq ans, j'ai vécu dans un orphelinat durant toute une année, jusqu'à ce qu'un émissaire du Sanctuaire soit venu me chercher. Il avait senti en moi une cosmo-énergie qui ne demandait qu'à s'épanouir, et m'a envoyé aux Cinq Pics pour que j'obtienne l'armure de bronze du Dragon. Je me suis donc entraîné pendant quatre ans dans ce but, jusqu'à ce qu'un jour, ma puissance se développât bien au-delà de la norme pour un chevalier de bronze. Mon mentor me révéla alors que je m'étais éveillé à l'ultime cosmos, que l'on appelle aussi le septième sens, bien au-delà du sixième, l'instinct. J'étais donc apte à devenir chevalier d'or. Aussi, non seulement parce que j'étais né un 20 octobre, mais en plus en raison de mon sens aigu de la justice, j'allais devoir poursuivre mon entraînement pour devenir le gardien de la septième maison du Zodiaque, le chevalier d'or de la Balance!...Ce que je suis devenu deux ans plus tard, à l'âge de douze ans." "Et l'armure du Dragon, qu'est-elle devenue?"demandai-je. "Après que je sois devenu chevalier d'or, le Grand Pope décida de me nommer maître d'apprentis. Or, au même moment, Sun, mon cousin que tu as vu hier, venait d'arriver au Sanctuaire, car un émissaire du Grand Pope avait perçu un cosmos en lui. Etant liés par des liens familiaux, il fut décidé que je m'occuperais de lui, pour qu'il obtienne l'armure du Dragon. Cela fait près de six ans qu'il est sous ma tutelle et il ne m'a pas déçu. Cependant, il lui manque encore une chose pour être digne de devenir chevalier sacré d'Athéna, mais je suis sûr qu'il l'obtiendra aujourd'hui!" "Aujourd'hui?" "Oui, son entraînement arrive à son terme aujourd'hui et je suis certain qu'il réussira l'ultime épreuve qui l'attend!...D'ailleurs, le voici, justement!" En effet, Sun arrivait dans notre direction. Je ne l'avais vu que peu de temps la veille, mais je n'eus aucun mal à le reconnaître. Il n'avait que quatorze ans, mais il en paraissait vingt, il semblait extrêmement mature pour un jeune garçon de son âge. Nul doute que l'entraînement de son cousin lui avait été largement profitable. Il vint dans ma direction et me salua: "Bonjour! Tu es l'un des naufragés recueillis par Felipe, n'est-ce pas?" "En effet, approuvai-je. Je suis John Roligny. Quant à toi, je sais qui tu es, tu es Sun, le cousin de Dohko et aspirant chevalier du Dragon!" Le jeune garçon me sourit: "Mon cousin t'a bien informé...Excuse-moi, John, mais il me faut y aller, Dohko est impatient de me voir revêtir l'armure de bronze du Dragon!" "Je comprends, Sun. Que le Seigneur soit avec toi pour cette ultime épreuve!" Sun me sourit timidement puis s'avança vers son cousin. Je leur avais brièvement tourné le dos, afin de faire le point sur cette conversation...mais quand je me retournai, je fus surpris de voir qu'ils avaient tous deux disparus! "C'est insensé! Comment ont-ils pu faire?" Toutefois, ne voulant pas trop chercher à comprendre, je décidai de poursuivre ma promenade dans les environs du Sanctuaire.
************ Valnoy Cela fait plusieurs heures que je suis enfermé dans ma chambre à lire la Bible, car je n'ai d'autre occupation que celle-ci...Mon Dieu, que je trouve le temps long! Cela fait plus d'un jour que je suis dans ce Sanctuaire voué au culte d'une idole et cela m'insupporte! Moi qui, depuis toujours, ai suivi les enseignements des Ecritures, je n'ai pas oublié ce commandement; C'est le Seigneur, ton Dieu, que tu adoreras, c'est à lui seul que tu rendras hommage! Même si les Juifs ont le tort de ne pas reconnaître Jésus comme le Messie, même si les catholiques se fourvoient en obéissant à l'autorité pontificale, même si les Musulmans ne considèrent le Christ que comme un simple prophète, au moins, ils ont le mérite de n'obéir qu'à une divinité unique et non représentée matériellement! Mais ce Sanctuaire, repaire de païens idolâtres...Seigneur, faites en sorte que nous ne restions pas longtemps ici!... Quelqu'un vient de frapper à ma porte. Je crains qu'il ne s'agisse de certains de ces chevaliers sacrés...Que dis-je? Seul Dieu est saint, je ne puis qualifier ces chevaliers de "sacrés"! Je ne sais quoi, mais quelque chose m'incite à leur permettre d'entrer: "Entrez!" La porte s'ouvre et deux jeunes hommes apparaissent devant moi. Je les reconnais; il s'agit du chevalier du Capricorne, qui nous a menés la veille dans la salle du Grand Pope, et du chevalier du Cancer, qui nous a souhaité d'être protégés par les dieux de l'Olympe...et cette pensée m'insupporte: "Que faites-vous ici? N'approchez pas de moi, maudits païens!" "Nous sommes tous deux catholiques, me répond le chevalier du Cancer dont je crois me rappeler le nom; Vittorio. Nous obéissons à Athéna, mais c'est une obéissance plus spirituelle que religieuse; la référence aux dieux de l'Olympe que j'ai faite hier n'était qu'une simple expression de langage. Quant à savoir ce que nous sommes venus faire ici, nous sommes venus nous assurer que vous alliez bien...mais ça n'a pas l'air d'être le cas..." "Comment pourrais-je aller bien? Moi, l'un des chrétiens du Nouveau Monde, fidèle à Dieu dans sa plus pure tradition, celle des Ecritures, hébergé dans ce lieu, ce Sanctuaire!..." "Si c'est cela qui vous tracasse, rassurez-vous, m'affirme Felipe du Capricorne. Nous sommes aussi venus de la part du Grand Pope pour vous dire qu'après-demain, vous devrez quitter le Sanctuaire." "Tant mieux!" dis-je enthousiaste. "Ne soyez pas trop jovial, m'avertit Vittorio. Si le Grand Pope veut que vous quittiez le Sanctuaire, c'est parce que vous n'y serez bientôt plus en sécurité...Il a un mauvais pressentiment, il craint que le Mal ne revienne bientôt!" "Tant qu'il y aura sur cette terre des hommes de bonne volonté, fidèles à Jésus-Christ, le règne du Mal attendra longtemps!" répliquai-je d'un air assuré. Les deux chevaliers restèrent muets quelques secondes durant, puis me laissèrent seuls, sans dire un mot. ************ Felipe et Vittorio, après s'être éloignés de la chambre du révérend Valnoy, se mirent à discuter tout en marchant: "Quel curieux personnage! lâcha le chevalier du Capricorne. C'est incroyable combien il est ancré dans sa foi!" "Oui...Je reconnais bien là l'un de ces puritains du Nouveau Monde, qui se sont installés là-bas pour pratiquer leur religion comme ils le veulent! N'empêche, quelle rigueur!" ajouta le chevalier du Cancer. "Il n'a rien à envier à Lévi en matière de dévotion religieuse!"dit Felipe en souriant. "Oui...Bon, maintenant, il faudrait aller voir le Grand Pope pour lui dire que nous nous sommes acquittés de notre tâche!"poursuivit Vittorio. Et les deux chevaliers d'or de partir vers la salle du trône. ************ De son côté, John errait dans la périphérie du Sanctuaire. Il s'était considérablement éloigné des arènes et des douze maisons du Zodiaque pour se trouver dans un endroit plus isolé, qui ressemblait beaucoup aux montagnes dans lesquelles lui, sa famille et son précepteur s'étaient égarés avant d'être recueillis par les chevaliers d'Athéna. Après s'être assuré qu'il n'y avait personne près de lui, il s'accroupit, baissa la tête et pria en silence. Lors de son enfance à New Rochelle, ses parents aimaient lui parler de ces protestants qui s'étaient réfugiés au début du siècle dans les Cévennes pour y vivre librement leur foi, loin des persécutions des dragons et de l'armée royale. Ces malheureux, lui disait souvent Etienne Roligny, s'étaient réfugiés dans le désert, d'une manière presque similaire à celle des Israélites pendant quarante ans, tout comme les pasteurs de ces synodes de fortune pouvaient être comparés à Moïse ou Elie. Et John avait l'impression de se ressourcer dans cet endroit isolé, pour prier. Il priait pour les marins disparus en mer l'avant-veille, il priait pour que ses parents et son précepteur figurent parmi les élus du Seigneur, il priait pour que l'humanité réchappe du drame annoncé par le Grand Pope. Après cinq minutes de prières intenses, le fils d'Etienne Roligny reprit sa marche, sans savoir précisément vers où il se dirigeait. Il marcha dans une direction choisie au hasard, quand il vit non loin devant lui une étendue d'eau: "Un lac? Il...Il y a donc un lac près du Sanctuaire? Je pense que je vais m'y aventurer, cela peut être agréable pour les yeux..." ************ "Agréable pour les yeux...Ironie du sort, j'ai vu près de ce lac quelque chose de très agréable pour les yeux, mais de terrible pour l'homme de foi que je m'efforce d'être en permanence..."soupira John. "Qu'entendez-vous par là?"demanda le révérend Trevor. Le jeune homme avala une nouvelle cuillérée de soupe, puis reprit son récit. ************ John s'avança donc près du lac, se frayant un chemin parmi les arbustes qui semblaient former une couronne protectrice autour de l'étendue d'eau. Ces arbustes ne lui facilitaient guère la tâche, tant ils étaient denses, comme s'ils voulaient empêcher le fils d'Etienne Roligny de parvenir au lac. Toutefois, faisant abstraction de cette large couronne verte, le jeune homme avança pas à pas, sans jamais s'arrêter, déterminé à atteindre son but. Tout à coup, il sentit qu'il marchait sur du tissu. Intrigué, il se baissa, prit le tissu entre ses mains, le nettoya d'un revers de la main et constata qu'il s'agissait d'un tissu blanc...plus précisément, d'un justaucorps blanc. Il le déplia, le scruta attentivement, puis songea: "C'est curieux...J'ai l'impression d'avoir vu ce costume, il n'y a pas longtemps..." Jetant un coup d'oeil au sol, John remarqua alors un masque de porcelaine. Un doute s'empara de lui: "Non...Se...Se peut-il qu'il s'agisse de?..." Une odeur vint alors lui chatouiller les narines. En fait, ce n'était pas une odeur, mais un parfum. Un parfum des plus suaves, qui aurait pu faire succomber n'importe quel homme sur cette Terre, même le plus inflexible. Et John connaissait ce parfum: "Il...Il faut que...que je l'admette...Ce parfum, cette tenue...Ce sont ceux de...!" A ce moment précis, les yeux du jeune homme s'étaient dirigés vers le lac et s'y étaient subitement arrêtés. Car quelqu'un s'y baignait, sans doute pour se détendre après l'entraînement mené au Sanctuaire. Ce quelqu'un, John l'avait reconnu, voire reconnue; c'était Emma de la Colombe. La jeune fille, entièrement nue, se baignait dans le lac avec le sourire aux lèvres, elle plongeait sous l'eau et en sortait régulièrement. Elle nagea ensuite vers un rocher sur lequel elle avait placé une espèce de savon et s'en frotta le corps avec. John était tétanisé par un tel spectacle. Pourtant, il n'était pas choqué de voir Emma dans son plus simple appareil. Bien au contraire, il avait l'impression de se retrouver au paradis. Après s'être savonnée, Emma plongea sous l'eau de nouveau pour se rincer et fit quelques brasses dans le lac, sans jamais perdre son sourire. Elle nagea pendant encore cinq minutes, jusqu'à ce qu'elle prît la décision de sortir de l'eau. A cet instant, John se souvint de ce que lui avait dit Eon des Poissons au sujet des femmes chevaliers; jamais un homme ne devait voir leur visage, sous peine de lourdes conséquences. Aussi se baissa-t-il promptement, de sorte à ne pas être vu. Toutefois, il put aisément voir le corps de la jeune fille dans toute sa nudité. Elle n'avait que quinze ans, mais semblait avoir développé toute sa féminité. Son visage était celui d'une jolie jeune fille blonde aux yeux aussi bleus que des saphirs. Ses bras et ses jambes semblaient incroyablement lisses, ses deux seins étaient parfaitement ronds, ses hanches étaient magnifiquement sculptées, deux hanches au milieu desquelles figurait un bel or blond. Tout cela, John put le regarder, l'admirer discrètement parmi les arbustes. La rougeur gagnait son visage, son coeur battait la chamade et ses mains se crispaient sur les branches, tant il était en admiration devant le corps du chevalier de la Colombe. Finalement, celle-ci s'étendit sur l'herbe pour se sécher, tout en souriant au ciel. Le jeune homme se décida alors à faire demi-tour et à revenir au beau milieu du Sanctuaire. Toutefois, quand la couronne verte qui protégeait Emma fut derrière lui, John se prit la tête entre les mains, tomba à genoux et murmura: "Non...Je ne peux pas...Je sais qui est celle qui m'est destinée! Je ne peux désobéir à deux des commandements divins!" ************ "C'était terrible pour moi, révérend, murmura John, les yeux baissés vers son assiette de soupe. Honore ton père et ta mère, et Dieu te donnera longue vie. Tu ne commettras point d'adultère. Pourtant, en...en désirant le chevalier de la Colombe, j'avais le funeste sentiment d'enfreindre ces commandements!" Le révérend Trevor resta impassible. Puis, il fronça les yeux et dit froidement au jeune homme: "Il est possible de comprendre ce sentiment, John. Vous étiez sur le point de vous marier, conformément aux voeux de vos parents, et vous avez contemplé le corps de cette jeune fille en cachette. Ce n'était pas digne de vous. Notez cependant que je ne vous juge point, en dépit des apparences...Seul le Seigneur peut le faire." John resta muet durant un bref laps de temps, puis reprit: "J'étais mal à l'aise, révérend...Enfreindre ces commandements pouvait indiquer que je ne faisais pas partie des élus voués à être sauvés par le Christ! Aussi, j'ai préféré ne pas rentrer tout de suite et errer dans le Sanctuaire, comme une âme en peine...Pendant ce temps-là, il se passait beaucoup de choses, loin du Sanctuaire..." Le jeune homme poursuivit donc son récit, en s'efforçant de soutenir le regard du pasteur, qui s'était renfrogné depuis l'aveu du fils de son défunt ami. ************ La porte du palais de Norst 1er, souverain de Skygard, s'ouvrit lentement. Sur le palier se trouvaient le vieux roi et Harald, son guerrier le plus vaillant. Ils étaient tous deux immobiles, mais leurs traits dévoilaient des sentiments différents. Si le visage de Norst était impassible et sombre à la fois, celui d'Harald était comme tétanisé. Apparemment, l'histoire de la malédiction lancée sur Skygard l'avait bouleversé. Les deux hommes ne se parlèrent pas pendant près d'une demi-minute, jusqu'à ce que le guerrier se décidât à rompre le silence: "Altesse...C'est effroyable ce que vous venez de me raconter...N'y a-t-il donc pas un espoir pour le royaume de Skygard?" Le vieux roi secoua la tête, avant de répondre: "Il n'y a aucune issue." Harald serra les poings de dépit, avant de répliquer: "Non! Je...Je suis sûr qu'il existe un moyen de rompre le charme! Avec ma force et celle de vos guerriers, nous pourrons empêcher l'anéantissement de Skygard, j'en suis convaincu!" Norst s'avança alors vers son fidèle serviteur et lui parla d'un air dur: "Harald, ta jeunesse a comme conséquence ton imprudence. Nul ne peut échapper à son destin. La volonté d'un homme ne pèse rien par rapport à la volonté d'un dieu. Des exemples nombreux se trouvent dans la mythologie grecque; Oedipe a tué son père Laïos et épousé sa mère Jocaste, bien qu'il ne l'eut pas voulu. Acrisos a jeté son petit-fils Persée à la mer, pour qu'il ne le tuât point, mais Persée survécut et le tua accidentellement lors de jeux organisés. Ce que le Destin veut, l'homme ne peut l'esquiver! Laisse-moi à présent, Harald, il me faut prier Dieu pour qu'il accorde la vie éternelle au peuple de Skygard, quand celui-ci succombera aux coups des forces du Mal..." Norst tourna aussitôt le dos à Harald et le laissa seul face au paysage enneigé. Le jeune guerrier était abasourdi par la leçon du vieil homme. Ce que le Destin veut, l'homme ne peut l'esquiver, telles étaient les paroles du souverain de Skygard. Mais Harald ne pouvait s'y résoudre: "Non! lâcha-t-il avec virulence. Cela ne se passera point ainsi! Je connais une autre leçon qui dit: Aide-toi, le Ciel t'aidera! Je suis sûr que Dieu nous viendra en aide, pour que nous puissions vaincre le Mal qui menacera bientôt notre contrée! Je le jure sur l'honneur de mon roi et du peuple de Skygard!" conclut-il en brandissant son épée vers le ciel. ************ Nous ne sommes désormais plus très loin des Cinq Pics. Là où je me suis entraîné pendant longtemps, d'abord aspirant à l'armure de bronze du Dragon, puis aspirant à l'armure d'or de la Balance, que je possède depuis six ans déjà...Et cette fois-ci, c'est à Sun de me prouver sa valeur. J'ai confiance en lui, il deviendra le 79ème chevalier à rejoindre les rangs d'Athéna. Bien qu'il lui reste encore quelques problèmes à surmonter, je suis sûr qu'il les vaincra aujourd'hui. En six ans, il a fait des progrès considérables; il maîtrise merveilleusement l'Envol du Dragon de Rozan et presque parfaitement la Colère du Dragon. Mais il n'arrive pas encore à inverser le cours de la grande cascade de Rozan, au fond de laquelle repose ce pour quoi il s'entraîne depuis près de six ans...Mais il y arrivera, j'en suis convaincu. Sun et moi restons bouche bée devant ce qui s'offre devant nous. Une tour grande de plusieurs mètres, constituée entièrement en pierre. Ses formes semblent irrégulières, l'on peut même y déceler quelques passages étroits. Mon cousin me demande alors: "Dohko, de quoi crois-tu qu'il s'agisse?" "Je n'en sais franchement rien...Peut-être faudrait-il s'en approcher de plus près, mais sans perdre trop de temps; je dois te faire subir la dernière épreuve pour que tu deviennes chevalier d'Athéna." Mon cousin hoche la tête, puis me suit. Nous ne nous rapprochons peu cependant, car nous sentons rapidement une étrange énergie confinée au sein de cette grande tour de pierre...Sun ne peut réprimer un frisson, tandis que j'observe ce sordide édifice de bas en haut. Un visage de pierre menaçant se trouve en plein milieu du bâtiment, ce qui ne fait rien pour atténuer l'impression sinistre qui s'en dégage. Tout à coup, je tombe sur un curieux bout de papier, sur lequel sont inscrits quelques inscriptions. Je n'ai guère eu de temps depuis le début de ma vie pour m'intéresser aux langues, mais...mais je reconnais ces lettres; il s'agit des lettres de l'alphabet grec...Et ce nom... "Athéna!!"lâche-je sous le coup de la surprise. "Tu as lu Athéna sur ce bout de papier?"me demande Sun. "Effectivement...J'ai...J'ai le sentiment qu'il ne faut surtout pas toucher à ce bout de papier, faute de quoi, les conséquences seraient funestes..." Mes paroles font croître l'inquiétude qui se trouve dans le coeur de mon cousin. Il me souffle alors: "Dohko, je...je ne suis pas tranquille...Cette tour...elle me semble remplie d'une intense énergie négative! Et ce papier au nom d'Athéna...Je ne veux pas rester ici une seconde de plus!" A la fois parce que je partage les sentiments de Sun et parce que je me souviens de mon premier objectif, je réponds: "Tu as raison...Mieux vaut reprendre notre course vers les Cinq Pics, et ce, le plus rapidement possible!" Sun hoche la tête en me souriant. Trois secondes plus tard, nous quittons cet endroit sinistre à la vitesse du son, vers les Cinq Pics et la grande cascade de Rozan. ************ Quelques heures plus tard, au temple d'Athéna La déesse de la Guerre attendait le Grand Pope près de sa statue mythique. Quelques minutes auparavant, elle lui avait rappelé qu'il devrait se rendre sur Star Hill le soir même, pour observer la position des étoiles, car elle pouvait donner des indices pour le futur proche ou lointain. Debout, l'air ferme, elle songeait: "Le moment de livrer bataille approche! Je le sens! L'ennemi refera surface dans peu de temps et tentera de réaliser ses funestes desseins: l'instauration des Ténèbres sur la Terre. Mais je jure devant l'Olympe que je lutterai contre lui jusqu'à ce que j'y laisse la vie! C'est mon destin et je l'accepte! Je lutterai, aidée en cela par les chevaliers de l'espoir!" Ce fut alors que le Grand Pope parut devant la jeune fille. Il s'agenouilla devant elle et lui dit: "Me voici, ma déesse. Je suis prêt à me rendre sur Star Hill pour y scruter les étoiles dans le ciel nocturne." "Je n'en attendais pas moins de vous, Grand Pope! Allez-y, voir de quoi il retourne!" "Avant d'y aller, ma déesse, je tenais à vous parler de ces quatre étrangers, que vous avez accepté d'héberger hier..." "Que souhaitez-vous me dire?" "J'ai simplement décidé qu'ils devront partir après-demain. Comme vous, je sens que les forces du Mal ne tarderont pas à menacer le monde et j'ai tout lieu de penser qu'ils s'en prendront rapidement au Sanctuaire, comme ils l'ont fait lors de la Guerre Sainte de l'an de grâce 1538! Le Sanctuaire risque donc d'être plus un danger qu'un asile pour eux! Je tenais à vous en faire part, car je ne puis prendre de décision sans votre aval, mais il vaudrait mieux que j'aie votre accord, déesse Athéna..." La déesse resta muette pendant une dizaine de secondes, tandis que le Grand Pope était solennellement prosterné devant elle. Finalement, elle lui donna la réponse suivante: "J'ai confiance en vous, Grand Pope. J'estime que vous avez pris une décision judicieuse. Vous avez mon aval!" "Merci, déesse Athéna. A présent, selon votre volonté, je vais me rendre sur Star Hill !" Le chef des chevaliers sacrés se releva, salua sa déesse en inclinant la tête, puis quitta le temple d'Athéna en empruntant le chemin qui menait au Mont Etoilé. Deux minutes plus tard, il parvint au pied de cette grande colline, dont le sommet était, disait-on, la distance la plus courte entre le Ciel et la Terre. Le Grand Pope regarda en l'air, avant de penser: "L'on dit de Star Hill que sa hauteur est si grande que même un chevalier d'or ne peut y parvenir! En ce qui me concerne, je sais que c'est faux depuis le jour où je suis devenu Grand Pope, mais il est nécessaire d'entretenir cette rumeur pour garder le secret qui plane sur ce lieu sacré!...L'heure n'est plus aux réflexions, mais à l'action! Allons-y!" Le Grand Pope sauta brièvement en l'air et agrippa un pan de roche. Plusieurs pans de la même espèce s'offraient à lui, pour faciliter son ascension. Bien qu'il connût par coeur le chemin menant au sommet de Star Hill, il eut parfois des difficultés à entreprendre cette escalade, en raison de son âge très avancé. Toutefois, la volonté et la foi en Athéna aidant, au bout de vingt minutes, il parvint tout en haut du Mont Etoilé. Il était seul avec le ciel étoilé, la nuit étant tombée depuis plus d'une heure. Seul un autel témoin des temps mythiques se trouvait sur Star Hill. Il haleta durant dix secondes, afin de reprendre son souffle, puis se redressa, prêt à exécuter la volonté de la Déesse de la Guerre. ************ Les Cinq Pics, en Chine "Yaaah!" Sun s'élança de nouveau contre la cascade de Rozan, mais rien n'y fit. C'était sa douzième tentative consécutive depuis que lui et Dohko étaient arrivés dans cette région après une courte escale près de la tour mystérieuse et cela faisait douze fois que le jeune cousin du chevalier d'or de la Balance ne parvenait pas à faire ce qu'il devait pourtant faire pour devenir chevalier sacré; inverser le courant de cette grande cascade qui dominait la région des Cinq Pics. Dohko, assis en tailleur près d'un rocher, semblait insensible aux échecs répétés du jeune garçon: "Tu n'y arrives toujours pas, Sun..." Le jeune Chinois resta debout pendant cinq secondes, les jambes tremblantes, puis se laissa tomber, les yeux emplis de larmes: "Je...Je n'y arrive pas, en...en effet...Je n'y arriverai jamais...C'est une épreuve trop difficile pour moi..." La réponse du chevalier de la Balance ne se fit pas attendre; elle fut cinglante: "Pleurer et te lamenter ne t'aidera certainement pas à réussir cette épreuve! Relève-toi, Sun! Quelqu'un qui veut devenir chevalier sacré d'Athéna doit en être digne! Un chevalier sacré doit toujours avoir la foi, continuer à lutter même quand il a perdu ses forces, se battre jusqu'au bout, jusqu'à ce que la Mort vienne le rappeler à lui!" "Mais, Dohko..."gémit Sun. "Il suffit, Sun! Tout aspirant chevalier a connu l'échec au moins une fois dans son entraînement! Et seuls ceux qui ont tiré des leçons de ces échecs ont pu s'avérer dignes de porter une armure!" Le chevalier d'or se tut durant une dizaine de secondes, avant de poser la question suivante au jeune garçon: "Depuis combien de temps es-tu sous ma tutelle, Sun?" L'aspirant chevalier renifla à deux reprises avant de répondre: "Depuis six ans environ, Dohko..." "A six ans, un enfant sait marcher! A six ans, un oisillon sait voler!" Sun répliqua, un peu agacé: "Mais à six ans, un enfant ne sait pas remonter le cours d'une cascade! Et il ne peut pas! C'est un acte impossible à faire, qui échappe à tout pouvoir humain! Seul Dieu pourrait remonter le courant de la grande cascade de Rozan!" Dohko se tut une nouvelle fois, avant de répondre: "Sun, si ce que tu as dit est vrai, alors jamais personne n'aurait revêtu l'armure du Dragon, qui repose sous cette cascade! Tu dis que seul Dieu pourrait réussir un tel acte, mais...un chevalier sacré n'est-il pas avant tout un homme protégé par une déesse?" Le jeune Chinois ne sut quoi dire face à la détermination de son mentor. Ce dernier enchaîna aussitôt: "Les chevaliers d'Athéna font des choses que de simples mortels ne peuvent faire! Ils peuvent fendre le ciel de leurs poings et la terre de leurs pieds! Un chevalier sacré est un homme, certes, mais un homme doté de pouvoirs presque divins!" "Mais...Mais je suis loin d'être doté de tels pouvoirs, Dohko!...Je ne vaux pas grand-chose à côté de toi, le chevalier d'or de la Balance!" Dohko resta alors silencieux pendant quinze secondes, puis lâcha: "Alors soit. L'épreuve est terminée. Tu me déçois, Sun, je pensais que tu avais vraiment le potentiel pour devenir chevalier d'Athéna..." "Non!!!" Le chevalier de la Balance ne s'attendait nullement à cette réponse. Il allait reprocher à son cousin son ton insolent, quand il le vit plier ses genoux et ses bras, tandis que sa mine se crispait...et qu'une aura de couleur verte commençait à émerger autour de lui. Dohko n'en revenait pas: "Sun...Que...Que t'arrive-t-il?" "Dohko, répondit le jeune garçon, il faut que je te remercie...En me reprochant mon manque d'endurance, tu as sans le vouloir réveillé le cosmos qui sommeillait en moi depuis plusieurs mois, mais que je n'arrivais pas à réveiller!...Dohko, je sens, non, je sais que je peux le faire! Cela me prendra le temps qu'il faudra, mais j'inverserai le cours de la grande cascade de Rozan!" Le cadet des chevaliers d'or sourit deux secondes plus tard; il ne s'attendait nullement à susciter chez son cousin une telle réaction. Il le regarda alors se concentrer petit à petit, faisant croître son cosmos de façon prodigieuse...jusqu'à faire éclater la chemise noire qu'il portait sur ses épaules. Désormais torse nu, Sun s'arc-bouta sur ses deux jambes, concentré sur son seul objectif; la cascade de Rozan, qui se trouvait à deux mètres de lui. Dohko regardait attentivement son disciple, qui était entouré par un halo bleu-vert dont la taille venait de dépasser les deux mètres de haut et qui grandissait encore, jusqu'à se rapprocher des trois mètres. Aussi songea-t-il: "Je savais que je ne devais pas douter de mon cousin!...Cette réaction d'orgueil...l'on pourra en dire ce qu'on en voudra, mais elle est pareille à la colère d'un dragon menacé par ses ennemis!...Je suis sûr que Sun sera un chevalier d'Athéna exemplaire!..." Tout à coup, il se produisit quelque chose d'inattendu qui retint l'attention de Dohko. Un curieux dessin apparaissait dans le dos de Sun, un dessin qui prenait forme peu à peu. Il y eut tout d'abord une griffe située près de l'omoplate gauche du jeune garçon et qui se vit même à l'endroit où se trouvait son coeur. Puis, un corps couvert d'écailles et pourvu d'une longue queue apparut sur le dos de l'aspirant chevalier sacré. Enfin, l'étrange illustration se dota d'une tête...La tête d'un dragon. "C'est...C'est incroyable...Lorsque je m'entraînais pour obtenir l'armure du Dragon, je n'avais pas obtenu une telle puissance...Vraiment, Sun sera l'un des plus remarquables chevaliers d'Athéna!" De son côté, le jeune garçon ne ménageait pas sa peine; la puissance qu'il déployait était telle qu'il parvenait à faire voler dans les airs des copeaux de terre et de rochers. Ses mèches de cheveux flottèrent un court instant dans le vent, il poussa un cri presque bestial, très proche du rugissement du Dragon mythique de l'Empire du Milieu, puis cria d'une voix assurée: "PAR LA COLERE DU DRAGON !!!" Sun s'élança alors vers la cascade de Rozan et la frappa d'un seul coup de poing. Une boule d'énergie apparut alors entre les chutes d'eau et le poing du cousin de Dohko et, en un centième de seconde, la cascade de Rozan cessa de couler. Un centième de seconde plus tard, elle remonta en un éclair jusqu'au ciel étoilé qui surplombait les Cinq Pics. Dans sa remontée, la cascade changea d'apparence, prenant la forme d'un dragon géant. Un simple mortel n'aurait rien pu percevoir de ce spectacle extraordinaire, mais Dohko, grâce à son statut de chevalier d'or, n'avait rien manqué de ce prodige. Il murmura alors: "L'eau de la grande cascade de Rozan avait les cieux pour origine. Elle est repartie d'où elle venait." Puis, plus haut: "Je te félicite, Sun! Tu maîtrises désormais à la perfection la Colère du Dragon de Rozan! Tu es digne de porter l'armure que cette cascade protégeait depuis plusieurs siècles!" Le jeune garçon était à genoux, quelque peu essoufflé par l'effort qu'il avait dû faire pour dépasser ses propres limites. Il leva les yeux et vit non loin de lui une urne dont l'emblème était une tête de dragon. L'urne s'ouvrit alors dans un flot de lumière verte et laissa apparaître ce pourquoi Sun s'était entraîné pendant six ans... ************ Malgré le froid des nuits automnales, le Grand Pope était immobile, trop occupé à contempler les étoiles pour se soucier de la température, qui n'était pourtant pas bien élevée au sommet du Mont Etoilé. Pour le moment, seuls deux faits retenaient son attention: Ces étoiles qui brillent...Ce sont les étoiles de la constellation du Dragon...L'armure du Dragon aurait-elle donc trouvé porteur? Dans ce cas, cela revient à dire que la chevalerie d'Athéna est désormais composée de soixante dix-neuf combattants! J'espère que cela sera suffisant pour notre combat contre les forces du Mal..."murmura-t-il. Dans la foulée, le représentant terrestre d'Athéna se focalisa sur le phénomène qu'il contemplait d'un oeil curieux et inquiet depuis qu'il était arrivé en haut de Star Hill; la position de l'étoile polaire: "C'est étrange...le degré de l'étoile polaire par rapport à l'axe polaire terrestre se rapproche du zéro...Elle n'est pas à sa position habituelle...Et, ce qui est encore plus étonnant, c'est que ce phénomène se produit en ce moment sous mes yeux!...Je parviens à distinguer, malgré mon grand âge, la mobilité de l'étoile polaire..." Le Pope s'interrompit brusquement dans ses réflexions, avant de lâcher, d'une voix emplie d'inquiétude: "Serait-ce là un signe fatidique que Dieu nous envoie?" ************ Les Cinq Pics, en Chine Sous les regards émerveillés de Dohko et de Sun, une armure bleue-verte ayant la forme d'un dragon se dirigeait vers celui qui avait réussi à inverser le cours de la cascade de Rozan. Elle avança lentement jusqu'à se retrouver au-dessus du jeune garçon, puis elle se sépara en plusieurs morceaux qui vinrent couvrir le corps de son nouveau propriétaire. Sun mit encore quelques secondes pour réaliser ce qui venait de lui arriver, puis contempla l'armure qu'il portait. Certes, comme toute armure de bronze, elle ne le protégeait que partiellement; seuls ses genoux, sa taille, sa poitrine, ses bras et ses épaules étaient couverts par l'armure de bronze du Dragon. Quant à sa tête, elle ne portait qu'un simple diadème surmonté de deux moustaches jaunes. Mais cette armure suffisait déjà au bonheur de Sun, qui lâcha, non sans émotion: "C'est...C'est magnifique! Dohko, je...J'ai encore du mal à réaliser que je suis devenu le nouveau chevalier du Dragon!...C'est...C'est superbe!..." Le chevalier de la Balance sourit à son jeune cousin, qui lui dit alors: "Dohko...Je tiens à m'excuser pour mon comportement au début de l'épreuve...Je n'aurais jamais dû me lamenter, comme ça, tu n'aurais pas eu à me dire que l'épreuve était terminée..." Dohko répliqua immédiatement: "Sun...Je savais pertinemment que cette épreuve n'était pas finie...Je savais que ton cosmos était en éveil depuis un certain temps et qu'il te manquait juste une chose pour le maîtriser...La réaction d'orgueil que tu as eue t'a permis de contrôler parfaitement la Colère du Dragon et de parvenir à tes fins...Plus ou moins consciemment, j'ai fait en sorte que tu ne te décourages pas et que tu puisses devenir chevalier sacré!" Sun leva les yeux au ciel en écoutant les paroles de son cousin. Ce fut alors qu'il aperçut plusieurs étoiles qui scintillaient au-dessus de lui. Son mentor lui expliqua tout: "Ce sont les étoiles de la constellation du Dragon, la constellation dont tu es sous la protection. Elles sont là pour saluer ton entrée dans la chevalerie d'Athéna...J'espère, non, je sais que tu te montreras digne de ton rang et des deux atouts que possède ton armure!" "De quels atouts veux-tu parler, Dohko?" "Regarde tes bras, répondit le chevalier de la Balance. Ton bras droit est protégé par une protection dont la résistance est telle que tu pourras briser toutes les défenses possibles. Quant au bouclier sur ton bras gauche, il possède une résistance équivalente à celle de ton poing, de sorte qu'aucune arme offensive ne pourra le percer. Cela ne veut pas dire pour autant que tu es invincible, bien au contraire. Mais avec l'armure du Dragon, dont la fermeté et l'éclat sont supérieurs à celui du diamant, tu pourras défendre Athéna avec toute ta puissance." Sun buvait les paroles de Dohko comme les dieux de l'Olympe se délectaient du nectar et de l'ambroisie. Une armure, un poing et un bouclier dont la résistance dépassait l'imagination...Jamais il n'aurait pu imaginer un tel présent en devenant chevalier du Dragon. Ce fut alors que son mentor et cousin le rappela sur Terre: "Toutefois, Sun, il y a trois choses que je dois te dire impérativement et que tu ne devras jamais oublier lorsqu'il te faudra combattre..." ************ La principauté de Bavière, dans le Saint Empire germanique Un homme de grande taille, fourbu, marchait dans la campagne environnante. Il avait passé le plus clair de son temps à faucher le blé pour son seigneur, qui était l'un des grands propriétaires terriens de la principauté et de l'Empire. A présent, après plus de douze heures de travail harassant, il n'aspirait qu'à une chose; rentrer dans la maison que lui louait le junker et retrouver son épouse et ses trois enfants: "Encore une journée de travail finie! Et d'autres aussi épuisantes en perspective! Avant de me coucher, je vais quand même un peu profiter de ma tendre Eva et de mes chers enfants !..." Tout à coup, le paysan s'arrêta brutalement de marcher. Ses prunelles brunes étaient devenues atones sans aucune explication rationnelle. Il semblait ne plus rien voir, ne plus rien sentir, ne plus rien entendre...sauf une voix grave qui résonnait dans sa tête: "Réveille-toi, étoile céleste de la victoire...Réveille-toi et va...Va servir jusqu'à ton dernier souffle l'Empereur des Ténèbres!" ************ Les campagnes du Yorkshire, dans le Royaume d'Angleterre Un cheval blanc galopait dans la campagne. Mais le cavalier qu'il portait n'était pas des plus singuliers...Il s'agissait d'une jeune fille, d'environ quinze ou seize ans. Une très belle jeune fille, aux longs cheveux noirs et aux yeux virant du marron au bleu. Elle portait une longue robe rouge et, malgré cet accoutrement peu approprié, galopait dans la campagne, un spectacle guère habituel dans cette région de l'Angleterre profonde, d'autant plus que ses habitants suivaient depuis plusieurs années la voie que John Wesley, fondateur de l'église méthodiste, leur montrait. Et la liberté affichée par la jeune fille constrastait fortement avec la rigueur morale voulue par ce prédicateur non-conformiste. Mais la jeune fille semblait n'en avoir cure, elle galopait, sourire aux lèvres, cheveux dans le vent...quand elle cessa subitement de diriger son cheval et s'arrêta au beau milieu de la campagne. Son ravissant regard devint étrange et une voix grave venue de nulle part lui sussurra: "Réveille-toi, étoile céleste du contrôle...Réveille-toi et va...Va servir jusqu'à ton dernier souffle l'Empereur des Ténèbres!" ************ Un paysage montagneux, en Grèce septentrionale Un berger regardait le ciel étoilé en compagnie de ses moutons. Il avait décidé de se reposer quelques minutes avant de les reconduire à l'étable. Il fallait dire que, depuis plus de dix ans, il ne faisait que garder ses troupeaux toute la journée, voire même la nuit. Une situation qui n'était pas confortable, financièrement parlant, mais le berger appréciait quand même la relative liberté que lui procurait cette activité. Il jeta un dernier coup d'oeil aux étoiles, et lâcha: "Bon! Le temps se rafraîchit, il ne vaut mieux pas que je reste trop longtemps inactif !..." Mais, alors qu'il allait reprendre sa marche, il se figea sur place. Son regard était devenu creux et une voix grave lui répétait inlassablement: "Réveille-toi, étoile terrestre violente...Réveille-toi et va...Va servir jusqu'à ton dernier souffle l'Empereur des Ténèbres!" ************ Les Cinq Pics, en Chine "N'oublie jamais ce que je viens de te dire, Sun." Telle était la conclusion des conseils que Dohko de la Balance venait de donner à son jeune cousin, fraîchement promu chevalier de bronze du Dragon. Le jeune garçon resta muet pendant quelques secondes, avant de répondre: "Ne t'en fais pas, Dohko. Je n'oublierai pas ces mises en garde et je resterai vigilant quand viendra pour moi le moment de me battre, je te le promets!" Le gardien de la septième maison du Zodiaque sourit, puis posa une main sur l'épaule de son cousin tout en lui disant: "J'ai confiance en toi, Sun. Tu seras l'un des plus brillants défenseurs d'Athéna, je te le prédis!...Bon, maintenant que tu as remporté l'ultime épreuve, inutile de nous attarder ici plus longtemps!" Sun hocha la tête et se sépara de l'armure du Dragon, qui se reforma en totem avant de retourner dans son urne. Le jeune garçon la mit sur son dos, puis partit avec son mentor à une vitesse proche du son. Ils parcouraient la Chine à une allure folle...quand ils s'arrêtèrent brusquement, freinés dans leur élan par l'émergence d'une puissante énergie. Ils regardèrent autour d'eux et Sun reconnut rapidement l'endroit où ils se trouvaient: "Dohko! C'est...C'est la tour que nous avions vue auparavant!" "C'est...C'est vrai...Mais...Mais elle semble bouillonner étrangement...Que...Que peut bien contenir cette tour, à la fin?...Elle...Elle est comme remplie d'un pouvoir démoniaque!" "Pourtant, remarqua judicieusement le chevalier du Dragon, nous y avons vu le sceau...le sceau d'Athéna!" "Tu as raison, Sun, approuva le chevalier de la Balance...Mais...Mais alors..." ************ Sur Star Hill Bien que cachés par son casque d'or, les yeux du Grand Pope n'avaient pas quitté l'étoile polaire. Elle bougeait lentement, mais incessamment dans le ciel, son angle par rapport à l'axe polaire terrestre se rapprochait inexorablement du zéro, un spectacle qui n'était pas pour rassurer le chef des chevaliers sacrés: "Rien n'arrête le mouvement de l'étoile polaire...D'ici à une minute, son angle sera de zéro...Ce sera le bon moment pour voir si mes craintes étaient fondées..." ************ Le royaume de Skygard Malgré le froid opiniâtre qui dominait le paysage, Harald n'était pas rentré à l'intérieur du palais royal. Depuis sa plus tendre enfance, il avait connu les températures les plus extrêmes, de sorte qu'il s'était aguerri au fil des années. Il regardait le ciel étoilé d'un air songeur, probablement pour oublier l'histoire que le roi Norst lui avait racontée, ainsi que cette malédiction destinée à provoquer l'anéantissement de sa patrie. Le guerrier aurait certainement continué à rêver les yeux au ciel, si le roi Norst n'était pas venu à ses côtés pour lui dire: "Harald...Le moment de la destruction de Skygard viendra bientôt..." "Quoi?!" "Regarde de nouveau l'étoile polaire, lui dit le vieux souverain...Ne la vois-tu pas se mouvoir dans les cieux?" Harald contempla l'étoile polaire quelques secondes, avant de répondre affirmativement: "En effet, votre altesse..." "Souviens-toi des deux premiers vers de la prophétie: Quand l'angle zéro l'étoile polaire atteindra/De sa noire prison le Mal sortira. Or, vois-tu, dans moins de vingt secondes, l'angle de l'étoile polaire par rapport à la Terre sera de zéro...Le compte à rebours est désormais enclenché, Harald, la première partie de la prophétie va s'accomplir..." Le roi Norst compta alors à voix basse: "Dix...Neuf...Huit...Sept...Six...Cinq...Quatre...Trois...Deux...Un..." ************ Sur Star Hill Le regard du Grand Pope se figea. L'angle de l'étoile polaire par rapport à la Terre venait d'atteindre le zéro. "Le sort en est jeté..."murmura le chef des chevaliers sacrés. ************ Les Cinq Pics, en Chine, quinze secondes avant que l'angle de l'étoile polaire ne soit de zéro Dohko et Sun étaient totalement figés par ce qu'ils voyaient. La tour marquée du sceau d'Athéna s'illuminait peu à peu. Mais il ne s'agissait pas de la lumière telle que les deux chevaliers sacrés la voyaient habituellement. Il s'agissait en fait de ce que l'on pourrait appeler une "anti-lumière", un rayonnement sombre, mais aussi intense que la lumière du soleil. Soudain, un grondement sourd et répétitif se fit entendre de la tour: "C'est...C'est de la sorcellerie!"lâcha le chevalier du Dragon. "Je...J'ai comme l'impression que nous n'allons pas tarder à savoir ce que cette tour contient!"ajouta son mentor. Tout à coup, un papier vola dans leur direction. Les deux chevaliers ne le virent que furtivement, mais le reconnurent aisément: "C'est le sceau d'Athéna qui était apposé sur la tour!"dit Sun. "Que...Que pouvaient être ces jets de lumière?"lâcha Sun. "Je...Je n'en ai aucune idée, répondit Dohko, qui n'était pas plus rassuré que son cousin. La seule chose dont je sois sûr au sujet de ces jets de lumière, qui ressemblaient à des étoiles filantes, c'est leur nombre exact!" "Comment? Tu es parvenu à les compter?"demanda le chevalier du Dragon, surpris par le potentiel de son mentor. "Ces rayons, voire ces étoiles, n'allaient pas aussi vite que la lumière, expliqua le chevalier de la Balance. Je suis parvenu à les compter malgré mon inquiétude...elles étaient au nombre de cent huit!" "Cent huit?! Tu...Tu ne vas quand même pas me dire que nous allons devoir combattre contre cent huit ennemis? A part toi et moi, il n'y a que soixante dix-sept chevaliers au Sanctuaire, soixante dix-neuf au total!" Dohko soupira: "Il faut malheureusement le croire, Sun...Quoi qu'il en soit, ne restons pas là; il faut immédiatement avertir le Grand Pope qu'un grand danger va, tôt ou tard, menacer l'humanité!" Sun approuva en hochant la tête, puis les deux chevaliers repartirent pour le Sanctuaire à la vitesse du son. ************ "Ce passage, l'on me l'a raconté après tout ce qui est arrivé et qui a failli causer la fin du monde...Ce n'était qu'une première étape...avant que ne survienne une chose que je n'aurais jamais imaginée..."confia John au révérend Trevor, d'un ton sombre. ************ Sur Star Hill Bien que n'ayant pas bougé, le Grand Pope avait pu, même à des milliers de kilomètres de là, sentir la déferlante d'énergie négative venant des 108 étoiles qui étaient sorties de la grande tour marquée du sceau d'Athéna. Il regarda le ciel et murmura: "Ainsi, le mouvement de l'étoile polaire était bien un signe envoyé par Dieu...Au moment où son angle a atteint zéro, le sceau d'Athéna s'est brisé et les 108 étoiles maléfiques au service de l'Empereur des Ténèbres sont parties se réincarner...Comme il y a 205 ans...A cette époque, j'étais sur le champ de bataille et j'en ai réchappé, avec neuf autres chevaliers...Mais cette fois-ci, je crains que cet affrontement ne soit fatal à toute la chevalerie..." Le représentant terrestre d'Athéna se tut alors cinq secondes d'affilée, avant de lâcher d'une voix plus forte: "Pour l'instant, seule une chose est certaine, désormais...Une nouvelle Guerre Sainte va commencer!!!"
|
![]() ![]() |
© 2002-2010 Animecdz. Tous droits réservés. Saint Seiya © Toei Animation, Bandai et Masami Kurumada | ||
![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() |