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Cette fiche vous est proposée par : Dyvimm Le Jugement dernier
Un attroupement de gardes se créait sur la plage du Sanctuaire. Jabu, qui avait entendu les bruits venant de la côte, s’était élancé aussitôt. Une jeune femme en haillons était étendue sur le sable. Les courants avaient dû charrier son corps jusqu’ici. Les soldats regardaient tour à tour la naufragée et le Chevalier de Bronze. Il ferma les yeux de cette adolescente aux cheveux émeraudes et ressentit un léger souffle lui caresser la main. « Cette femme n’est pas morte ! Poussez-vous ! Il lui faut de l’air pour respirer ! Allez chercher Marine et Seika ! Il faut s’occuper d’elle tout de suite ! » Quelques gardes exécutèrent l’ordre alors que Jabu transportait la jeune personne dans une cabane où on pourrait la soigner. Son cœur battait plus rapidement qu’il n’aurait dû au contact de cet être frêle et d’une grande beauté, qui menaçait à tout instant de perdre la vie. Marine et Seika arrivèrent peu après dans la cabane où Jabu avait trouvé refuge et commencé à éponger les plaies qui parsemaient son visage. Marine s’arrêta net sur le pas de la porte. « Dehors Jabu ! Immédiatement ! Elle avait déjà jeté le jeune Chevalier hors de l’abri. Jabu n’avait su que faire. Ce n’était pas le cas de Marine qui avait aussitôt repris le Sanctuaire en main. La Guerre Sainte était terminée, mais il y aurait encore beaucoup de travail pour préparer les suivantes ; même si pour tous, cette perspective dépassait le cadre de leur courte durée de vie. Deux cents, trois cents ans de trêve… voilà ce qu’ils avaient gagné. L’attaque d’Hadès s’était en effet produite sans préavis. Certes, Athéna avait prévu un affrontement et chacun était resté à son poste, mais qu’est-ce que des gardes auraient pu faire face aux Chevaliers d’Or ressuscités ? La déesse elle-même avait demandé que les Chevaliers de Bronze n’interviennent pas. C’est alors qu’une ombre était apparue derrière un rocher. Vêtu d’une cape partant en lambeaux, un envoyé d’Hadès se présenta à eux. Les Chevaliers de Bronze n’essayèrent même pas de réfléchir avant de se lancer à l’assaut de leur ennemi. La toile se déchira mais l’homme n’avait pas bougé. Tous virent ses yeux embués de larmes et firent quelques pas en arrière, estomaqués de reconnaître l’habit que portait ce spectre. Shina elle-même avait poussé un cri en reconnaissant l’armure du Sagittaire.
Jabu marchait lentement, les pieds dans l’écume, perdu dans ses pensées. Ils avaient fait ce que le Chevalier d’Or du Sagittaire leur avait dit. Pourtant, un goût amer persistait, celui de n’avoir servi à rien. Aucun spectre n’était venu les affronter sur Terre. Les seules attaques qu’ils avaient dû parer étaient celles du Dieu de la Mort, Thanatos. Jabu aurait presque préféré périr sous les coups du Dieu que de se sentir inutile. Cela avait duré quelques temps jusqu’à ce qu’un événement extraordinaire se produise. Tous les Saints avaient perçu ce jour-là, un immense cosmos qui avait envahi le Sanctuaire. Au début, les Chevaliers de Bronze avaient cru à une attaque, mais très rapidement, ils avaient ressenti l’aura bienveillante qui avait englobé le domaine. Cette énergie provenait de la plus haute salle, du palais d’Athéna lui-même. Si Jabu avait au début espéré le retour de la déesse, il ne s’agissait pas de son cosmos. Tous avaient traversé les douze Maisons du zodiaque et lorsque enfin, ils avaient pénétré dans le Palais du Pope, Shiryu, Ikki et Hyoga étaient à genoux en signe d’allégeance envers celui qui siégeait sur le trône du représentant d’Athéna sur terre. Le Grand Pope était de retour. Depuis, la vie du Sanctuaire s’était réorganisée. Hyoga et Shiryu étaient assignés à la protection des Maisons du Zodiaque. Ils avaient également pris des disciples, même si les meilleurs guerriers ne faisaient pas forcément les meilleurs professeurs. Kiki poursuivait sa formation pour devenir, au plus vite, Chevalier d’Or du Bélier. Cependant de nombreuses questions restaient en suspens, comme l’absence des Armures d’Or. Bien que descendant du peuple de Mû, Kiki était incapable de reproduire de tels modèles.
Arrivée à Delphes « Cet endroit est absolument magnifique ! J’avais jamais vu des temples comme ça ! C’est les hommes qui ont bâti tout ça ? L’homme aux longs cheveux de nacre, accompagné du jeune métis, s’éloigna du groupe de visiteurs, comme l’avait précédemment fait Thali. Ils doublèrent les monuments antiques, l’amphithéâtre où s’étaient déroulés tant de Jeux, pour commencer à gravir la paroi du mont Parnasse. Nan Li suivait avec précaution son précepteur qui le devançait de quelques pas. Il s’engouffra dans un interstice et plongea au cœur de la montagne. Nan Li lui emboîta le pas, se demandant bien où Urani voulait l’emmener. Pourtant, il n’avait nulle crainte. Urani était plus qu’un précepteur ou qu’un cousin. « C’est étrange. On dirait qu’il y a déjà eu des combats ici. Pourtant rien n’a encore commencé. Où est donc Alcyon ? » Indifférent aux remarques d’Urani, Nan Li contemplait la vaste salle. Deux colonnes marquaient l’entrée de la grotte dans laquelle ils venaient de pénétrer, le sol était dallé et deux flambeaux entouraient les montants de portes massives qui scintillaient comme de l’or pur. « Et bien, puisqu’il n’y a personne ici, av… » Avant qu’Urani n’ait pu finir sa phrase, les gonds frémirent puis grognèrent en s’ouvrant. La force de mille hommes était nécessaire pour faire bouger les deux battants et pourtant, un unique homme apparut aux yeux des deux visiteurs. D’une stature exemplaire et hors du commun, un géant couvert de bandages s’approcha de Nan Li avant de mettre un genou à terre. « Seigneur, pardonnez-moi de ne pas avoir pu vous accueillir à temps. Je suis Alcyon, Gardien Doré de votre cité et je m’en remets à votre bon vouloir. » Nan Li regardait ce colosse qui venait si brusquement de lui donner le titre de Seigneur. Cet homme était-il à son service, comme Urani ? Il jeta un regard interrogateur à son précepteur qui ne disait mot. C’était donc à lui d’intervenir. « Alcyon, je m’appelle Nan Li et suis heureux de te rencontrer. Relève-toi. D’où te viennent toutes ces blessures ? Alcyon se releva péniblement et regarda pour la première fois Urani qui, en un éclair, avait perçu ce qui s’était passé ici ; puis il invita les deux étrangers à le suivre. Monts Kouen Louen, Chine Sanosuke jeta nerveusement un coup d’œil sur l’arène centrale cernée de ses puissantes colonnades. Tous étaient là, tendus comme lui, vingt-deux samouraïs, prêts à combattre et mourir pour leur Dieu, entraînés dans ce but depuis des générations. Le moment allait enfin venir où ils devraient montrer leur courage et leur force. Un moment unique puisque jamais cela ne s’était produit par le passé. Alors pourquoi maintenant ? Même Diomède dont la mémoire était infaillible, ne pouvait le dire. A ses pieds, s’étendaient les trois légions guidées par chaque Séphire : Gaboria, Séphire de Yésod, Mintaka, Séphire de Malktuh et Raphaël, Séphire de Tiphéreth, les plus redoutables combattants. Chacun menait une légion de six à sept combattants répartis en Ishims, Kéroubims, et Malachims. Des nuages s’amoncelèrent. Il arrivait, ce ne pouvait être que lui. Serait-il seul ? Vraisemblablement pas. Sanosuke percevait sa formidable aura qui peu à peu se développait dans toute la vallée. Les cris des faucons s’étaient tus. Sanosuke aperçut un groupe de cinq hommes apparaître derrière les grilles de l’enclave. Aussitôt, genou à terre, il baissa la tête en signe de soumission alors que, derrière lui, l’ensemble des combattants faisait de même. Pas un bruit ne venait troubler cette étrange atmosphère. L’aura de leur Majesté était impressionnante, jamais Sanosuke n’en avait ressenti de pareille. « Empereur de l’Equilibre, Mars est venu te confier une importante mission ! Relève-toi que je te présente ceux qui me suivent ! » Sanosuke put enfin contempler le visage de son Dieu, il était rayonnant. Le jeune garçon lui faisant face était illuminé de toute sa divinité. Les noirs nuages qui s’étaient accumulés à leur arrivée sur toute la vallée, formaient une trouée qui laissait passer les rayons du soleil dont leur Dieu était baignés. A cet instant, il sut qu’il était prêt à mourir pour Lui. « Armée de l’Equilibre ! Le temps est venu pour toi d’entrer en action ! Samouraïs, pour la première fois depuis la nuit des temps, vous allez quitter ces montagnes et vous rendre en Grèce pour affronter les Chevaliers d’Athéna ! C’est à vous, que reviendra l’honneur de me représenter dans le défi qui nous oppose ! Samouraïs, levez-vous ! » Tous purent alors contempler leur Dieu nimbé de lumière. Il avait dressé les mains au ciel. Le regard et l’aura qu’il dégageait, imposaient le respect. « Empereur, je te présente Ayar Manco, Empereur de la Miséricorde. » Le compagnon de Mars fit un pas en avant et s’inclina devant Sanosuke. Que cet homme semblait simple, lui qui était également Empereur. Il lui rendit son salut. « Je suis ravi de vous rencontrer, Sanosuke. On m’a dit énormément de bien de vous et je vois que votre sanctuaire est bien dirigé. Les trois vieillards s’approchèrent à leur tour et s’inclinèrent légèrement devant Sanosuke. Le plus âgé d’entre eux prit la parole. « Bonjour à vous, Empereur de l’Equilibre. Où se trouve donc Diomède ? Ce dernier s’avança devant Diego, comme il l’avait ordonné. « Samouraïs ! Je viens également vous remettre un présent qui assurera votre victoire contre les Chevaliers d’Athéna. Empereur, ce que j’ai à vous remettre est plus ancien que bien des trésors oubliés sur cette Terre. Elles ont été formées au moment de la création, baignées de la puissance des Monts Kouen Louen. Indestructibles, elles feront de vous les meilleurs combattants de cette planète ! Voici les Arcanes de Mars ! » Trois raies lumineuses s’élevèrent au ciel depuis les mains de Diego et se divisèrent chacune en huit autres rayons, perçant l’obscurité de la vallée et frappant les monts environnant l’enclave. Le sol se mit à trembler alors que de multiples explosions déchiraient la terre. De chaque alvéole ainsi créée, scintillèrent de multiples formes. Une musique résonna dans toute la vallée, un chant soulevé par l’appel de toutes les armures que porteraient les défenseurs de Mars. « Combattants ! Ces Arcanes sont les protections les plus solides de l’Univers ! Elles sont réalisées à partir de toutes les pierres précieuses de la Terre. Elles accroîtront vos capacités et feront de vous les plus forts. Néanmoins, vous aurez à les mériter pour pouvoir les revêtir. Chacun d’entre vous va devoir partir dans cette montagne pour les retrouver. Vous aurez à unir votre aura à la leur, c’est à cette seule condition que vous pourrez vous les approprier !… » Une décharge d’énergie s’élança brusquement vers le ciel, interrompant Numa. Sanosuke sentait vibrer en lui un appel comme il n’en avait jamais connu. Tout son être était secoué de soubresauts. En face de lui, l’Arcane Principale répondait à cet appel et fondit sur lui. En un instant, il fut recouvert de cette protection de la tête aux pieds et il sentit fuser en lui une énergie nouvelle, incommensurable. Peu après, il vit les trois Arcanes suivantes disparaître pour recouvrir les trois Séphiroth. Bientôt, toutes les autres fondirent également sur les combattants présents. Il ne restait plus que quelques unes d’entre elles qui n’avaient pas trouvé de possesseurs. « Et bien il semblerait que tous les combattants se soient déjà accordés avec leurs Arcanes, Numa ? » Le Grand Prêtre ne trouvait les mots pour répondre. Diomède était descendu sans que personne ne s’en aperçoive et avait traversé l’arène pour rejoindre Mars et ses compagnons. « Votre Majesté, je vous souhaite la bienvenue à Kouen Louen ! » Diomède s’inclina vers Mars qui le regardait très sérieusement. « Relevez-vous Diomède ! Il n’est pas besoin que vous vous incliniez devant moi. Vous devez posséder plus de mille fois mon âge. Expliquez-moi pourquoi les Arcanes sont venues recouvrir si promptement vos combattants. Tous les apprentis et les combattants entamèrent un chœur de chants tout en dégageant un passage à travers l’arène jusqu’au temple dans lequel Diego put assister, pour la première fois, à la ferveur de ses combattants animés de l’énergie nouvelle fournie par les Arcanes. Visite guidée de la Cité d’Apollon Nan Li n’en revenait pas du paysage qui s’offrait devant lui. Après une descente de plus d’une heure, Urani et Alcyon l’accompagnèrent dans un endroit extraordinaire. Il était sûr de se trouver sous la montagne et pourtant, il régnait ici la même atmosphère, la même luminosité qu’en plein air. A ses pieds, s’étendait une vision fantastique, peuplée d’arbres, de temples, de fontaines, de fleurs… un Paradis végétal. Un chemin dallé, d’un blanc pur, descendait dans la vallée et se perdait en méandres avant de remonter au loin, ligne sinuant jusqu’aux temples les plus imposants, dont le principal était sculpté directement dans la paroi de cette caverne souterraine. « Jeune Maître, nous devons suivre cette allée, la Via Dei, qui nous conduira de l’autre côté de la cité, devant la Pythie qui vous accueillera et vous fera passer le test. Au cours de ce chemin, qui durera plusieurs heures, vous aurez l’occasion de rencontrer tous ceux qui vous vénèrent et sont prêts à mourir pour vous. Cela fait si longtemps que l’on vous attend… » Nan Li vit les larmes qui emplissaient les yeux d’Alcyon. Était-il possible que ces hommes le vénèrent à ce point ? Lui, le petit garçon des rizières. Urani dévia son attention. « Je te présenterai ceux que tu rencontreras. Tous ne sont pas encore arrivés. Ils sont à ton service et s’ils te doivent le respect, tu le leur dois également. Ce sera ma dernière leçon. Au terme de ce voyage, tu rencontreras ta destiné puisque la Pythie en a décidé ainsi. Alors tu sauras qui tu es vraiment. Maintenant allons-y. » Décidés, les trois hommes s’avancèrent sur la Via Dei. Ils traversèrent divers paysages verdoyants, des bois parcourus de rivières emplies de poissons chatoyants. Ils y rencontrèrent plusieurs musiciens et musiciennes, des nymphes pour la plupart qui peuplaient ces étendues. « Majesté, au nom de toutes les Muses qui gardent vos Trésors, je vous souhaite la bienvenue au Sanctuaire. Veuillez accepter ce verre d’ambroisie avant de poursuivre votre route. » Après le passage des neuf Trésors, l’allée continuait puis se divisait en ramifications pour rejoindre le Palais d’Esculape qu’Hippocrate, un des cinq Sacrificateurs, gardait, ou encore celui de Neoptolemus, gardé par Cyparissus. Les autres sentiers conduisaient aux temples de Leuketes, Hyacynthos et Admète, les trois autres Sacrificateurs. Thali, Muse de la Comédie attendait au bord d’un de ces chemins, le passage d’Apollon. Le jeune homme, le bras enroulé dans un linge, une béquille sous l’autre, sanglota de bonheur à l’arrivée du cortège. Son émotion non contenue mit Nan Li dans l’embarras, lui qui se sentait également sur le point de pleurer. Finalement, les deux garçons se prirent dans les bras l’un de l’autre et Thali se joignit au groupe qui suivait Apollon. Après avoir remonté la longue pente de l’autre versant, l’allée déboucha sur plusieurs habitations formant un petit village rassemblé autour d’une place octogonale, au milieu de laquelle Castalie, la fontaine sacrée, répandait une eau pure et transparente, s’écoulant en huit ruisseaux identiques avant de rejoindre Céphise, le fleuve du Sanctuaire. Autour de cette place, sept magnifiques demeures abritaient chacun des Sages : Thalès, Pittacos, Solon, Cléobule, Myson, Chilon et Bias. Urani expliqua à Nan Li qu’il s’agissait là des hommes les plus sages de leur époque, qu’Apollon, en son temps, avait choisi de récompenser en les installant dans sa cité. Ils ne l’avaient plus quittée depuis. De majestueuses marches de la même pierre blanche dont était construit la plupart des temples : l’omphalos, s’élevaient sur la huitième portion de la place. Sur les côtés, des colonnes torsadées formaient des arches ouvrant sur d’autres marches et guidant à travers les bois vers de nouvelles Maisons, plus modestes. Nan Li en dénombra douze de part et d’autre. Calliopé lui expliqua que ses demeures étaient celles des prêtres Exétèges, les Traducteurs de la Pythie qui, en ce moment, attendaient sa venue auprès de leur maîtresse. Leur comité avait la charge de l’intendance du Sanctuaire et du Conseil sur lequel se reposait la Pythie. Enfin, le jeune suzerain posa le pied sur la dernière marche, atteignant une esplanade constituée de statues d’or et d’omphalos. Au bout de cette place, des colonnes de plusieurs mètres de haut encadraient l’entrée du Palais d’Apollon. Les douze prêtres Exétèges formaient une haie d’honneur pour accueillir leur Dieu. Tous s’inclinèrent très bas devant le jeune garçon, alors que des pétales de rose fleurissaient à ses pieds. Nan Li était impressionné et ne savait comment se comporter. « Relevez-vous mes amis… » Les prêtres joignirent leurs mains en forme de prière et le bruissement de leurs toges blanches accompagna le cortège d’une cinquantaine de personnes. L’intérieur du temple était aussi illuminé que l’était tout le Sanctuaire. Les colonnes s’élevaient vers un plafond invisible, nimbé de lumière. Les statues représentaient tous les exploits du Dieu Apollon depuis la nuit des temps. Sa participation aux Jeux, ses amours avec Daphné, sa sœur Artémis… Nan Li dévorait des yeux ces vestiges d’une autre époque dont il n’avait aucun souvenir. « Bienvenue à toi, jeune Nan Li. Je me nomme Hippocrate et je suis le représentant de ton fils Esculape dans ce Sanctuaire. Voici Admète, Hyacinthos, Leukates et Cyparissus. Nous sommes les cinq Sacrificateurs, ceux par qui quiconque voulant consulter la Pythie est obligé de passer. Nous jugeons les demandes des hommes en quête de réponse. Erophile, Pythie de ce Sanctuaire nous a chargés de te juger. Tu es la réincarnation d’Apollon mais l’esprit du Dieu ne s’est pas encore réveillé en toi. Notre devoir est de t’éveiller à cette autre dimension. Maintenant, tu dois échapper à ton destin de mortel pour devenir un Dieu sur Terre. Nan Li était impressionné. Devait-il accepter l’épreuve ? Il n’avait que huit ans et tant de choses s’étaient produites depuis les dernières semaines. Il chercha des yeux Urani, qui l’avait toujours guidé, mais ce dernier n’était plus à ses côtés. Il avait pris place parmi les autres Muses. Quel risque avait-il à se désaltérer avec cette boisson alors que sa gorge commençait à s’assécher ? L’eau serait sûrement rafraîchissante. Urani vit son disciple et Dieu approcher d’Hippocrate. Ainsi, il avait choisi de renoncer à sa jeunesse d’homme, renoncer au destin paisible de tout autre petit garçon pour devenir une divinité. Comment Apollon allait-il investir le corps de ce jeune enfant ? Urani avait peur de perdre Nan Li. Que subsisterait-il de lui après la transe ? Si la Muse avait toujours su que ce moment arriverait, comment aurait-elle pu se douter que ce serait si tôt ? Les choses s’étaient précipitées et malheureusement, la Terre avait besoin d’un nouveau protecteur. Urani ne put retenir une larme lorsque Nan Li porta la corne à ses lèvres. Il pleurait la mort de son jeune élève. Les Enfers, Première Prison
Une prairie à perte de vue. Le ciel d’un tendre bleu domine au dessus de nos têtes. De ci, de là, quelques arbres foisonnent de pommes pourpres. Des animaux sauvages vagabondent en toute liberté : biches, cerfs, lapins... Six jeunes gens sont réunis sous l’ombre d’un saule. Près d’eux, un cours d’eau chuinte tendrement. Une jeune femme chante et tous l’écoutent attentivement. Ce n’est pas tant son incroyable beauté que la manière dont elle captive l’attention par la mélodie de sa voix, qui attire le regard. Ses longs cheveux d’un noir profond ondulent délicatement et retombent en fines mèches jusqu’au creux de ses reins, cintrés d’un paréo à la blancheur immaculée. Je m’avance et à mes pieds l’herbe noircit. Les bourgeons éclosent, les fleurs se fanent et les pétales retombent en poussière. Mes pas se dirigent vers le groupe de chanteurs. Comment ne remarquent-ils pas ma présence ? Tout autour de moi meurt. Un des garçons expose ses biceps au groupe. Il est sans doute très fort. Voilà, elle a levé les yeux sur moi et son regard ne s’en détache plus. Elle est magnifique, elle n’a pas peur. Pourtant, moi je suis terrorisé. Les autres sont interloqués et ils se sont levés. Ma présence ne les réjouit pas, je les effraie. Shun se réveilla en sursaut. Des gouttes de sueurs perlaient sur son visage. Tout son corps ruisselait, mais il était surtout affolé. Les battements de son cœur heurtaient douloureusement sa poitrine. Ses yeux cherchaient dans le vide un élément auquel se rattacher, mais dans la petite pièce aux murs drapés de longues tentures rouges, rien ne lui était familier. S’y ferait-il jamais ? De son lit à baldaquin retombait une mousseline fine et transparente l’isolant du reste du monde. Depuis plusieurs années terrestres, il vivait ici, sans plus voir le ciel au dessus de sa tête. Il avait lui-même choisi son châtiment : les Enfers. Sa dette serait trop longue à expier et toute sa vie, il en subirait les conséquences. Athéna elle-même, dans son infinie sagesse, l’avait pardonné mais, quoi qu’en dise les autres, il était seul face à sa faute. Le repos qu’il prenait le laissait chaque fois plus faible. Son corps se portait à merveille mais pas son esprit. Se remettrait-il un jour des séquelles de la possession ? Comment oublier quand les souvenirs de l’autre remontaient perpétuellement à la surface ? Il n’y avait pas d’échappatoire. Son seul soutien, c’était la déesse qu’il avait choisie de servir à jamais et dont il sentait l’influence partout dans ce royaume. Chaque pierre transpirait de l’incroyable bonté qu’elle dégageait. Cependant, dans ce monde, tous ne pouvaient pas profiter de cet amour. Certains étaient là pour souffrir et même Athéna en avait conscience. Elle n’y pouvait rien. Pardonner n’était plus possible, et pour Shun non plus. Pour celle à qui il avait juré fidélité, le chevalier de bronze d’Andromède avait quitté son armure. Il était maintenant un des piliers fondamental des Enfers. Chargé de sonder les âmes arrivant de ce côté du Styx, Shun décidait des tourments à infliger, et tellement peu de personnes étaient destinées au bonheur. Au début il avait cru pouvoir changer cette loi, être un juge bon et aimant de l’humanité. Hélas, il avait vite compris que les âmes ne voulaient pas de cet amour. Pour une personne méritant le Paradis, un millier d’autres était destiné à souffrir pour se racheter. Shun quitta la pièce de velours rouge. Il devait reprendre sa place dans le temple d’un de ses anciens adversaires. Comme à son habitude, il s’installa sur le trône de marbre qui était devenu le sien, en face d’une table sur laquelle s’empilaient des milliers de parchemins. Fermant les yeux, son cosmos doré se répandit autour de lui. Il en avait acquis une parfaite maîtrise. Laissant ses ondes spirituelles se corréler avec celles de la déesse, il appelait à lui les âmes défuntes. Il ne lui fallait maintenant que peu de temps pour les diriger vers la prison adéquate pour l’éternité de leur existence. Leurs moindres faits et gestes étaient connus et pesés, elles-mêmes connaissaient pour la plupart ce qui les attendait. Les Chevaliers d’Or… Ces êtres exceptionnels… tous disparus… comme Seiya… Une larme coula de ses yeux clos. Son frère de combats, disparut également dans cette bataille dantesque… à jamais. Son esprit avait quitté ce monde. Personne n’aurait pu dire où il se trouvait, pas même les Dieux, pas même Athéna. Parti tout comme les Chevaliers d’Or, aspiré par le Néant. Leurs âmes ne sont pas revenues aux Enfers. Les morts terminent leur existence ici, mais ceux que ce monde a rejetés, où vont-ils ? Une seule personne disposait peut-être de la réponse à cette question, et malheureusement, elle-même avait subi un sort identique : Hadès, l’Empereur des Enfers. Le seul Dieu possédant l’ultime réponse avait disparu lui aussi. Souvent, il se rendait avec Saori à Elysion pour y contempler la dépouille de Seiya. Saori s’effondrait systématiquement en larmes et Shun devait la raccompagner. Saori… Athéna… une seule et même personne… et pourtant deux personnalités. Athéna la déesse de la Guerre et de la Sagesse et Saori, une humaine éveillée aux sens d’une déesse. La communion des deux en faisait cet être fragile qui souffrait pour l’Humanité et avait dû renoncer à sa propre vie. De rapides flux d’énergie traversaient la pièce entourant Shun, très faibles, mais si nombreux. Ils virevoltaient autour de sa puissante aura avant d’être dirigés vers le lieu qui les méritait.
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